Craquer pour un nouveau smartphone, acheter une télé plus grande, refaire sa garde-robe pendant les soldes, remplacer son lave-linge en panne… On change ses appareils et objets bien trop vite. Or, leur fabrication a un impact important sur le climat. On peut chacun agir à son niveau. Et les entreprises et pouvoirs publics doivent aussi intervenir pour lutter contre l’obsolescence programmée.  

Sommaire :

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Des appareils et objets qui impactent le climat

Fabriquer des biens de consommation génère beaucoup d’émissions de gaz à effet de serre, en particulier quand il y a de l’électronique. Cela nécessite également des quantités énormes de matières premières (métaux, minéraux), d’eau et d’énergie. 

Par exemple, fabriquer une télévision nécessite près de 2,5 tonnes de matières premières et génère 343 kg éq CO2.[1]

Un smartphone c'est 50 kg de CO2. Bien moins qu'une machine à laver. Le problème, c'est qu'on le remplace beaucoup trop vite. 700 millions de smartphones sont jetés chaque année, dont beaucoup sont encore parfaitement fonctionnels.

Voici les valeurs pour plusieurs autres objets quotidiens :

Objet

Kilos éq CO2 (sur l’ensemble du cycle de vie)

… dont kilos éq CO2 pour la fabrication et la distribution

… dont kilos éq CO2 pour l’utilisation sur la durée de vie moyenne[2]

Poids des ressources utilisées (fabrication)

Smartphone (5’’)

33

32,9

0,1 (2 ans)

183

Tablette (9 à 11 ‘’)

70

63,2

7,4 (3 ans)

324

TV (40 à 49’’)

422

343

40 (8 ans)

2488

Ordinateur portable

169

156

18 (4 ans)

711

Chaise en plastique

28

34

0 (10 ans)

33

Sèche-linge

588

301

302 (13 ans)

3103

Lave-linge

539

340

238 (11 ans)

2268

Lave-vaisselle

513

270

255 (11 ans)

2829

Réfrigérateur / congélateur combiné

382

257

167 (11 ans)

1596

Manteau

89

85

0,5

113

Pull en laine

56

53

1,5

66

Jeans en coton

25

23

0,8

50

Robe en coton

56

50

3,5

108

Chaussures en tissu

19

17

0

28

Sac à dos d'écolier 10 9 0 (2 ans) 14

Émissions de gaz à effet de serre de la fabrication (extraction de matières premières, approvisionnement, mise en forme), de la distribution et de l’utilisation d’une sélection d’objets objets.
Source : étude ADEME


On ne considère ici que le CO2 mais les autres impacts sur l’environnement sont tout aussi importants : acidification de l'air et de l'eau douce[3], eutrophisation de l’eau douce[4], effets respiratoires…

Garder les objets plus longtemps permet donc de diminuer l’utilisation de ressources et les impacts liés à la fabrication et à la distribution.
 

On répare, on donne, on vend

Pour épargner 150 kg de CO2 par personne et par an, on prolonge la vie de son smartphone, son ordinateur, ses électroménagers, ses vêtements…

Avant toute achat :

On peut aussi :

  • Réparer ce qui est cassé.

    On vérifie si la réparation est possible et si elle en vaut la peine. Avec le prix de certains objet, l’obsolescence programmée et le coût de la réparation, on peut être tenté de remplacer un objet plutôt que de le réparer. La réparation est pourtant une clé de voûte pour la durabilité des objets. Il suffit parfois d’une petite soudure ou d’une couture pour qu’un objet puisse continuer à servir.

    Les Repair Cafés, issus d’initiatives citoyennes, proposent un service gratuit (ou à petit prix) et convivial. On peut y apprendre à réparer des vêtements, des ordinateurs, des tablettes, des portables, des petits électros, des vélos… Tout dépend des forces vives sur place car ce sont des bénévoles passionnés qui mettent à disposition leurs mains expertes. Une liste des Repair Cafés est reprise sur repairtogether.be

    Si les Repair Cafés sont en plein essor (en Wallonie il y en a dans une commune sur deux), d’autres réparateurs disparaissent, comme les cordonniers (en dix ans un cordonnier sur quatre a fermé[5]). En partie parce qu’on préfère acheter des chaussures moins chères que l’on jettera après un an et qu’on ne fera pas réparer.

    Le benchmark de la réparation[6] indique d’ailleurs que le nombre de réparateurs par rapport à la population est particulièrement faible en Belgique.

    > Voir : Comment (faire) réparer un objet cassé ou en panne?
     
  • Revendre ou on donner ce dont on ne se sert plus.

    On s’est habitué à jeter facilement : quand un objet n’est plus au goût du jour, même s’il est encore fonctionnel, il finit trop souvent à la poubelle ou au parc à conteneurs. Alors qu’un objet encore en bon état peut être donné ou vendu. On prolonge ainsi sa durée de vie.

    > Lire : Où peut-on donner un appareil, un objet et dans quel état ?

Mais n’est-il pas plus intéressant de remplacer certains appareils par de plus récent qui consomment moins d’énergie ? Rarement. Par exemple, garder son lave-linge plus longtemps permet d’économiser 30 kg de CO2 par année. En Belgique, cela correspond à 130 kWh d’électricité. Il faudrait  donc que le nouveau consomme au moins 130 kWh de moins que le précédent. Et encore faut-il qu’il tienne la durée de vie escomptée (11 ans), sinon il n’y aura aucun bénéfice, au contraire.

> Lire aussi :

Les pouvoirs publics doivent lutter contre l’obsolescence programmée

Les pouvoirs publics doivent développer le secteur de la réparation et accélérer le passage à l’économie circulaire.

Une étude sur l’obsolescence programmée[7] a montré que développer le secteur de la réparation pourrait créer 810 emplois nets en Belgique. C’est loin d’être négligeable, d’autant que ce sont des emplois non délocalisables.

Un chaînon manquant est une législation contre l’obsolescence programmée. Il n’est pas acceptable que le consommateur se retrouve avec un appareil hors d’usage après quelques années alors qu’il pense acheter un gros électroménager qui devrait tenir 10 ans ou plus.

La réparation devrait être beaucoup plus encouragée par différentes mesures :

  • Généraliser la TVA à 6% (au lieu de 21%) pour les activités de réparation. C’est déjà le cas pour la réparation de vélos, de chaussures et d’articles en cuir, de vêtements et de linge de maison. Le taux réduit ne concerne que la main d’œuvre et non les pièces détachées qui restent taxées à 21%.
  • Obliger les fabricants à tenir à disposition des pièces de rechange pendant plusieurs années.
  • Afficher un indice de réparabilité.
  • Allonger la garantie légale (en fonction du type d’appareil, par exemple 5 ans au lieu de 2 ans pour les gros électros).

Idéalement, ces mesures devraient être prises au niveau européen. Mais c’est également possible d’agir au niveau national comme le fait la France (loi contre l’obsolescence programmée, indice de réparabilité, obligation mise à disposition de pièces de rechange…).

> Lire aussi : Que faire contre l’obsolescence programmée ?


Les entreprises aussi agissent

Certaines entreprises d’économie sociale sont très actives dans la récupération et la réparation, avec un bénéfice à la fois environnemental et social. Le label Rec’Up garantit la qualité des produits et des services de ces entreprises.

Quant aux entreprises classiques, elles devraient être encouragées à vendre des services plutôt que des produits, ce que l’on appelle l’économie de la fonctionnalité. Un exemple bien connu est le leasing de photocopieurs. Au lieu d’acheter la machine, le client la loue. Si elle tombe en panne, il ne paie pas la réparation, c’est le fournisseur qui doit assurer la continuité du service. Ce dernier a donc tout intérêt à proposer des machines fiables et facilement réparables pour éviter des interventions fréquentes et coûteuses.

Cela implique un changement de modèle économique assez radical (vendre des services plutôt que des produits) et ne se fait pas du jour au lendemain. C’est pourquoi les Régions accompagnent des entreprises dans leur transition.

L’économie de la fonctionnalité n’est qu’un aspect d’un écosystème plus large de l’économie circulaire (basée sur l’écoconception : diminuer l’utilisation de ressources, fabriquer des produits réparables et facilement démontables, puis réutiliser les matériaux …), en opposition avec l’économie linéaire (produire, utiliser, jeter).  

En attendant, des initiatives se développent au sein de certaines entreprises. Une marque de petits électros a décidé de mettre à disposition des pièces détachées pendant 10 ans, un fabricant de meubles rend certaines parties du mobilier modulables pour faciliter la réparation…
 

Plus d'info

"Climat : arrête d'en faire des tonnes", campagne 2019 d'écoconso

 

[1] éq CO2 = équivalent CO2. Le CO2 représente 80% des gaz à effet de serre émis par les activités humaines. Mais on produit aussi d'autres gaz à effet de serre : le méthane, le protoxyde d'azote et les gaz flurorés notamment. On transforme l’ensemble de ces gaz en équivalent CO2, une unité commune pour quantifier l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre.

[2] Pour la phase d’utilisation, les émissions de CO2 en France sont trois fois moins élevées qu’en Belgique : 60 g CO2/kWh (chiffre RTE) vs 220 gCO2/kWh (chiffre AIE).

[3] L’acidification est l’augmentation de l'acidité d'un sol, d'un cours d'eau ou de l’air en raison des activités humaines. Les écosystèmes sont affectés par les déséquilibres chimiques et biologiques qui en résultent.

[4] L’eutrophisation est un déséquilibre (causé par la hausse des concentrations d’azote et de phosphore) qui amène un développement excessif de certaines plantes et algues. Celles-ci qui « asphyxient » le milieu et réduisent ainsi sa biodiversité.

[5] Source : RTL Infos.

[6][6] ADEME, mai 2018.

Dernière mise à jour
20 juin 2019
Rédigé par
Jonas Moerman

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