Pas simple de rendre son quotidien plus durable... Voici des idées pour faciliter les changements de comportement et avancer pas à pas. Alors, on s'y met ?
« C’est dingue, il faut changer ça ! ». Cet élan d’indignation, cette vague d’émotion, cette envie d’agir concrètement, ça vous est déjà arrivé de la ressentir ? Par exemple après avoir vu une actu ou un reportage sur le climat, la perte de biodiversité, les déchets, les conditions de travail dans l’industrie textile…
On veut changer, faire sa part à son échelle mais, le lendemain, le quotidien a repris le dessus.
Pas le temps, l’énergie, les moyens… Comment dépasser ces freins pour passer réellement à l’action ? Ici, pas de formule toute faite, mais plutôt des pistes à choisir et tester pour transformer ce déclic en actions durables dans la vie de tous les jours.
Sommaire :
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Une majorité de personnes déclarent vouloir agir pour l’environnement. Pourtant, leurs actions se reflètent peu dans les statistiques. C’est ce que l’on appelle le « green gap », la différence entre les intentions et les comportements réels, mais ce n’est pas une fatalité.
Évidemment, tout ne repose pas sur les épaules des citoyen·nes, les entreprises et les pouvoirs publics ont aussi leur rôle à jouer. Par exemple, moins utiliser la voiture sera plus facile s’il y a des transports en commun disponibles et efficaces, des itinéraires vélos sécurisés, des incitants au covoiturage, une offre pour louer des véhicules partagés, etc. Une initiative parmi d’autres : pour faciliter l’accès à une alimentation durable et de qualité aux personnes précarisées, un projet de sécurité sociale de l’alimentation a été testé dans un quartier de Bruxelles[1].
Ceci dit, si l’on attend que la situation soit parfaite pour agir, on ne le fait jamais. On se heurte bien sûr à des obstacles sur lesquels il est difficile d’agir. Mais il y aussi beaucoup de leviers d’action individuels qui peuvent aider à faire évoluer la société. Alors comment agir à son niveau dès aujourd’hui ?
Il faut connaître son ennemi pour le combattre ! Quand on arrive à identifier ses freins quotidiens, il est possible d’apprendre des techniques pour essayer de les contourner.
Attention, ça suppose de se questionner avec franchise mais aussi sans complaisance : quels sont les vrais freins et quelles sont les excuses ? ;-)
On passe en revue plusieurs freins ci-dessous mais le changement de comportement n’est pas une science exacte et il peut y avoir de nombreuses (autres) raisons à l’inaction.
> Lire aussi : Changement de comportement : pourquoi on n’agit pas pour le climat
C’est ce en quoi on croit dur comme fer, et qui nous fait tenir un propos ou poser un comportement basé sur cette certitude. Nos croyances trouvent notamment leur origine dans l’éducation (famille, école...), les expériences comme les toutes les premières fois, la répétition (c’est arrivé plus d’une fois donc c’est comme ça) et les traumas. Notre cerveau, pour notre survie, a aussi tendance à avoir certains biais. Par exemple d’optimisme ou, à l’inverse, d’impression d’inefficacité… Sur la question de la crise climatique, cela peut par exemple inciter à penser que la technologie va nous sauver ou, au contraire, que l’on ne peut rien changer car c’est la faute à la surpopulation, aux autres pays…
> Lire aussi : 10 idées reçues sur le climat… et comment y répondre
=== ON SE QUESTIONNE ===
Est-on prêt·e à remettre en question ses certitudes ? A-t-on certaines idées reçues ? Y a-t-il des solutions en lesquelles on a envie de croire juste parce qu’elles nous paraissent plus simples ?
Même si elle n’est pas optimale, il faut admettre que la routine est rassurante. Nos habitudes sont souvent beaucoup plus solides que ce que l’on pense.
=== ON SE QUESTIONNE ===
Résiste-t-on au changement par habitude (« j’ai toujours fait comme ça ») ? Quelles routines nous empêchent de changer (nos déplacements ou nos achats alimentaires par exemple) ? Est-on ouvert∙e à tester de nouveaux rituels plus vertueux ?
On a souvent l’impression de ne jamais avoir assez de temps pour « tout » faire, de courir après sa montre, de ne pas voir la fin de sa to do list… Ça vaut la peine de voir s’il est possible de voir réapparaitre un peu de temps, différemment.
=== ON SE QUESTIONNE ===
Manque-t-on vraiment de temps ou est-ce plutôt une impression ? Quelles sont nos priorités et leur accorde-t-on le temps que l’on voudrait ? Quels sont nos « voleurs de temps » ? Peut-on simplifier certaines choses ?
Avant la fin du monde il y a la fin du mois. C’est vrai, le changement peut nécessiter un investissement préalable, qu’il soit financier ou matériel. Faire ses courses en vrac implique par exemple d’avoir des sacs réutilisables et des bocaux de récup. Aller travailler à vélo nécessite d’investir dans un abonnement de vélo partagé ou d’acheter un vélo. Manger bio peut coûter plus cher que d'acheter des produits industriels (mais pas toujours), économiser l’énergie nécessite souvent d’isoler son logement…
=== ON SE QUESTIONNE ===
Connait-on précisément son budget et ses dépenses ? Pourrait-on consommer moins mais mieux ? A-t-on déjà testé des actions qui combinent écologie et économies ?
Les normes sociales jouent un rôle crucial dans nos comportements, et bien plus que ce que l’on a tendance à s’avouer ! On peut aussi avoir peur de s’isoler si on fait des choix qui ne sont pas dans les habitudes de nos proches.
=== ON SE QUESTIONNE ===
Y a-t-il des comportements qu’on adopte en raison de sa famille, de ses amis, de ses collègues mais qui ne nous conviennent pas ? Quelles choses ferait-on différemment si on était seul∙e ? Est-on plus motivé∙e quand on agit en groupe ou aime-t-on aussi agir en autonomie ? A-t-on déjà été jugé·e pour avoir fait certains choix écologiques et, si oui, cela a-t-il été dérangeant ?
On fait face à de plus en plus d’informations sur l’environnement, partout et tout le temps. À un tel point que l’on se sent parfois noyé∙e et on a du mal à identifier les solutions à mettre en place.
=== ON SE QUESTIONNE ===
Comment s’informe-t-on ? Nos sources sont-elles fiables ? Combien de temps passe-t-on sur les réseaux sociaux ?
C’est clair que quand on fait la liste des problèmes environnementaux à résoudre, il y a de quoi angoisser et vouloir baisser les bras ou se protéger.
=== ON SE QUESTIONNE ===
Y a-t-il des sources d’info qui nous angoissent plus que d’autres ? A-t-on aussi accès à des infos positives ? Si l’éco-anxiété était comme une courbe de deuil, où se situerait-on : dans la phase de colère, de négociation, d’acceptation ?
Être informé∙e ne suffit pas à opérer un réel changement chez tout le monde. Toutefois, concernant le climat, on constate que le green gap serait plus petit parmi les personnes qui ont une meilleure compréhension des mécanismes sous-tendant le changement climatique.
Savoir pourquoi on agit renforce la motivation à changer.
L’œuvre de Banksy « I don’t believe in global Warming »
Encore faut-il savoir où s’informer et s’assurer que les sources sont fiables :
Mapping de sensibilisation au climat de Néo & Néa
Comprendre le problème permet aussi de comprendre quels gestes sont les plus efficaces. Par exemple :
=== ACTION ! ===
On peut vite se sentir perdu·e dans un trop-plein d’informations sur l’environnement. Voici des idées pour s’informer sans se noyer[2] :
Pour ancrer les changements dans la durée et les rendre réalistes dans son quotidien, il n’est pas recommandé de changer sur tous les fronts en même temps. Même si pour certaines personnes, ça peut très bien fonctionner (par exemple pour Vinz Kanté est passé d’animateur star d’une émission radio à un créateur de média sur l’écologie en un clin d’oeil[3]).
Le fait de changer du tout au tout peut sembler décourageant, surtout quand l’énergie du début retombe. Si on se fixe un objectif très ambitieux, on aura beaucoup de satisfaction si on réussit mais on risque d’avoir une perte de motivation si on échoue. Alors que si on se fixe des plus petits paliers à atteindre au fur et à mesure, on se réjouit de voir chacune de ses réussites.
Ce qui marche le mieux d’après les études : commencer par certains petits gestes, qu’on prend le temps d’ancrer dans nos habitudes, et qui sont souvent un tremplin vers d’autres changements de comportement plus conséquents[4]. Il faut bien commencer quelque part ! Tant que l’on ajoute petit à petit des actions par la suite, on ne fait qu’aller vers un mieux.
=== ACTION ! ===
On choisit UN petit geste et on s’engage à le faire dès aujourd’hui.
Si la clé est dans la régularité, le secret du changement durable repose avant tout sur l’objectif, afin de donner un sens à notre changement[5]. Identifier son objectif, clarifier ce que l’on veut changer, augmente les chances d’atteindre un véritable changement.
=== ACTION ! ===
On ouvre son agenda et on fixe tout de suite 15 minutes de rendez-vous avec soi-même pour définir UN objectif.
On peut utiliser la méthode SMART pour définir son objectif[6].
Par exemple, au lieu de juste se dire de façon générale qu’on voudrait « moins utiliser la voiture », on peut se fixer comme objectif de réduire ses kilomètres en voiture de 20% (ou 10 ou 50%, cela dépend bien sûr de la situation de chacun·e).
Adaptation du visuel de ecofriendly choices.
Pour noter ses objectifs et suivre ses progrès, on peut tenir un journal / carnet ou utiliser une application. Cela peut aider à garder le cap et renforcer la motivation en cas de moments plus compliqués.
On duplique ensuite le processus sur une autre habitude précise et mesurable.
On a un budget limité ? Ça fait partie des données à prendre en compte pour fixer un objectif réaliste et atteignable. On commence par des solutions qui combinent écologie et économies :
> Lire aussi : Comment alléger son budget grâce à l’écoconsommation ?
Changer une habitude sur le long terme est un processus qui s’installe dans le temps, avec patience et bienveillance.
Ça ne sert à rien de se mettre la pression, il faudrait en moyenne 66 jours pour ancrer un comportement[7], mais un véritable changement peut parfois prendre plusieurs années (selon son ampleur, la fréquence, le contexte...). Il est important de se laisser du temps pour expérimenter, adapter et installer la nouvelle habitude.
Si on échoue un jour, on ne se décourage pas. On recommencera le lendemain. Comme la clé du changement durable est dans la régularité, on adopte des petites actions répétées.
Une fois ancrée, la nouvelle habitude devient plus automatique et demande moins d’effort. Alors c’est bingo : ça veut dire qu’elle s’intègre durablement dans une routine quotidienne, et on peut concentrer ses efforts sur un nouveau changement.
=== ACTION ! ===
Une question fondamentale pour opérer un changement est donc : de quel temps dispose-t-on ? On a souvent l’impression de manquer de temps, et pour certaines personnes, c’est effectivement le cas.
Voici quelques propositions pour y voir plus clair :
Extrait du podcast "écoconso & vous" - saison 3 "On mange quoi demain", rencontres avec des consommateurs & consommatrices
Matrice d'Eisenhower pour distingue l'important de l'urgent. Illustration : Ofol [CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons]
Enfin, on relâche la pression ! L’avantage avec le temps c’est qu’il y a un lendemain qui donne l’occasion de recommencer en cas d’échec ou de s’améliorer un peu plus chaque jour.
Ce n’est pas toujours simple de rester motivé·e, notamment quand on regarde l’actualité et la lenteur avec laquelle certaines choses évoluent… Alors voici des idées pour se donner un coup de boost quand le moral ou la volonté flanchent.
Nos actions ont de l’effet, souvent plus qu’on ne le pense ! Des changements structurels et sociétaux sont évidemment nécessaires et urgents, mais nos actions individuelles ne sont pas vaines pour autant, surtout que l’on n’est pas seul·e à agir. Des normes sociales basculent, des initiatives inspirantes fleurissent de partout...
=== ACTION ! ===
On a du mal à voir le positif ? Pour se remotiver, on s’abonne à des sites, podcast et/ou comptes Instagram qui relaient des infos positives et inspirantes.
> Voir notre sélection de ressources pour faire le plein d’espoir.
« On ne peut pas changer si cela ne nous apporte pas du bien-être »[10]. On peut y rechercher du confort de vie, de la convivialité, de la joie, de la cohérence, du ludique, de l’apprentissage…
> Pour en savoir plus sur les bénéfices à écoconsommer : Less is more.
Bref, on essaie que cela ne ressemble pas à un devoir !
=== ACTION ! ===
On choisit au moins une activité « plaisir », on réfléchit à rendre un nouveau comportement plus fun… ou on identifie les bénéfices de l’une de nos actions déjà adoptées. Par exemple :
C’est bien connu : seul on avance vite, ensemble on va plus loin. Le changement individuel se renforce avec le collectif au travers des interactions[11]. Se mettre en réseau permet de se nourrir, se cadrer et se motiver en cas de besoin, qu’il s’agisse de partager avec ses amis, ses voisins, ses collègues, d’intégrer un collectif qui partage les mêmes projets ou de se faire accompagner par une personne ressource.
=== ACTION ! ===
Et si on lançait des défis dans son cercle proche pour tester des nouveaux comportements ensemble ? Quelques idées :
Plus l’activité est ludique, positive, conviviale, plus elle aura tendance à être vue de façon positive et aura plus de chance de rayonner autour[12].
Les potes ou la famille ne sont pas trop branchés environnement (voire sont récalcitrants aux questions écologiques) ? Il ne sert à rien d’insister, on respecte leur choix tout en restant fidèle à nos décisions. On cherche d’autres personnes et lieux pour partager ses questions et son engagement. Par exemple :
> Voir des suggestions : Transition écologique : dans quelle action collective s’engager ?
À l’impossible nul n’est tenu ! On s’accorde le droit de tester, d’expérimenter et donc, parfois, de rater. On ajuste alors et on recommence mieux le lendemain. Et on se rappelle que, pour faire évoluer une habitude, l’important c’est la régularité pas l’intensité !
=== ACTION ! ===
On a fait un écart ? On a perdu une bonne habitude ? On n’a pas atteint un objectif ? On garde toujours de la bienveillance envers soi-même :
[1] La sécurité sociale de l’alimentation est une initiative qui tente de donner accès à une alimentation de qualité à toutes et tous, inspiré de la sécurité sociale de la santé. Plus d’infos sur FIAN Belgique. Voir aussi cet article de la RTBF sur le test à Schaerbeek en 2024 : Une sécurité sociale de l’alimentation à Bruxelles.
[2] « Drowning in a Sea of Green: Navigating Information Overload in Ecofriendly Choices” El Haffar G. (2023)
[3] « Vinz Kanté, de Fun Radio à l’écologie », Reporterre (2024).
[4] « Comment faire évoluer les comportements de ses proches vers des pratiques moins carbonées ? » The shifters
[5] « Tout le monde veut sauver la planète mais personne ne veut descendre les poubelles : petit guide théorique, pratique et éthique pour éclairer l’accompagnement au changement » Graine asbl (2018
[6] Il s’agit de critères utilisé dans la gestion de projet mais qui peuvent être adaptés ici.
[7] « How are habits formed: Modelling habit formation in the real world” Lally P. et al. (2009)
[8] Plus d’infos : https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_Pareto.
[9] Quick win : gain rapide.
[10] « Tout le monde veut sauver la planète mais personne ne veut descendre les poubelles : petit guide théorique, pratique et éthique pour éclairer l’accompagnement au changement » Graine asbl (2018
[11] Les échanges et témoignages entre pairs ont souvent un impact bénéfique pour le passage au changement. Voir « Tout le monde veut sauver la planète mais personne ne veut descendre les poubelles : petit guide théorique, pratique et éthique pour éclairer l’accompagnement au changement » Graine asbl (2018
[12] « Comprendre le changement de comportement » Bruxelles Environnement et « Tout le monde veut sauver la planète mais personne ne veut descendre les poubelles : petit guide théorique, pratique et éthique pour éclairer l’accompagnement au changement » Graine asbl (2018).