L’argumentaire d’Icynène, cet isolant en mousse expansive est soigneusement construit : écologique, très isolant, 99% d’air, le reste étant à base d’huile végétale, une liste de « certifications » à rallonge et un site Internet qui ne manque pas d’explications. On a la sensation d’être bien informé et de pouvoir faire confiance. Une belle façade qui cache celui-dont-on-doit-taire-le-nom : le polyuréthane
Un tour sur le site du producteur révèle une flopée d’arguments « Icynène pour l’environnement » :
Tout un programme !
En cherchant plus d’informations sur la composition du produit, on découvre en réalité que la mousse isolante est produite par réaction de deux composants liquides : de l’isocyanate MDI (Diphenylmethane, 4-4 diisocynanate) et du Polyicynene (un polymère en phase aqueuse sans CFC). Or, le premier composant n’est autre qu’un dérivé pétrochimique utilisé pour la fabrication de… polyuréthane ! Un mot qu’on ne trouvera nulle part sur leur site. Vous avez dit « écologique » ?
Quand à la performance en termes d’isolation, avec un coefficient lambda (conductibilité thermique) de 0,038, il se situe simplement dans la moyenne. À titre de comparaison, la cellulose en vrac se situe entre 0,035 et 0,04 (1). (Au plus bas le chiffre, au mieux.)
Quant au transport et à la non-contribution au réchauffement climatique, si les arguments sont recevables, ils ne considèrent toutefois qu’une partie de l’impact de la production de l’isolant. Si l’on tient compte de l’ensemble de l’énergie grise du produit, la mousse de polyuréthane fait partie des isolants les plus gourmands, avec ses 1 000 à 1 200 kWh/m³ contre 50 kWh/m³ environ pour la cellulose par exemple (2).
Enfin, si l’on regarde de plus près la liste de « certifications » que le produit et l’entreprise mettent bien en valeur sur leur site, on s’aperçoit qu’il y a beaucoup de poudre aux yeux. Ainsi, le marquage CE n’est pas une certification mais confirme simplement que le produit satisfait aux normes pour être vendu dans l’Union européenne. L’ETA (pour l’Europe), le CSTB (pour la France) et le BBA (pour le Royaume-Uni) servent à prouver des informations techniques sur les produits, avec une vérification par un tiers. Ce ne sont donc aucunement des certifications ou des labels environnementaux. L’EPBD propose une base de données officielle confirmant des caractéristiques techniques (notamment le coefficient d’isolation). Aucun critère ne doit être satisfait pour y figurer. REACH concerne l’enregistrement et l’évaluation des produits chimiques dans l’Union Européenne. Ne parlons pas de l’affichage d’une démarche qui est seulement en cours. Reste VIBE, seule réelle labellisation environnementale… qu’Icynène affiche alors qu’elle lui a été refusée !
Ce type de matériau présente l’avantage d’offrir une isolation efficace, y compris pour des endroits peu accessibles, et ce pour un coût raisonnable. Et vu l’urgence de réduire la consommation d’énergie dans le bâtiment, c’est déjà pas mal. Mais pourquoi en rajouter et se faire passer pour ce que l’on n’est pas ? L’économie d’énergie résultant d’une bonne isolation est une plus-value environnementale mais ce résultat peut être atteint par différents types d’isolants, dont certains sont réellement naturels. Toutefois, ce produit-ci ne peut certainement pas être considéré comme écologique en lui-même !
Plus d’informations sur les isolants via notre campagne Rénovation écologique, saine et accessible.
(2) Source : fiche-conseil n°155 d’écoconso « L’énergie grise des matériaux de construction ».
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