Il est 17h15. Nous sommes à Foldiland. Le temps est radieux. Un peu chaud pour la saison, mais cela n’inquiète pas encore ses habitants.

Theresa rentre de son travail, fatiguée. L’ambiance est un peu difficile au bureau pour le moment, entre ses collègues qui veulent partir et créer leur propre boîte, et ceux qui veulent rester. Et ça crée aussi des tenisons avec la maison-mère, qui veut bien être flexible mais voudrait savoir sur quel pied danser. Cette indécision, c’est fatigant.

Et en plus, on est mardi, jour de lessive. Heureusement, cette semaine c’est son coloc, David, qui est de corvée « pliage de linge ».

C’est donc le cœur léger qu’elle ouvre la porte.

David est dans le divan. Il joue à la console avec son copain Nigel (Boris n’a pas pu venir).

- David, n’était-ce pas ton tour de plier le linge ? Tu as déjà fini ?

- Bien sûr Theresa, n’as-tu pas vu l’immense carton d’emballage dans le garage ?

- Oh ! c’est vrai, tu l’as achetée alors ? J’avais déjà oublié.

- Oui, elle a été livrée aujourd’hui, le livreur m’a expliqué que les livraisons étaient allongées pour le moment. Une sombre histoire de frontières et de douanes à laquelle je n’ai rien compris.

- Tu n'avais pas lu les conditions avant de la commander ?

- Oh ne recommence pas Theresa, on a voté pour l'acheter. Maintenant, elle est là, c'est fait.

- Et Nigel d’ajouter : J’espère que nos voisins ne vont pas nous demander de la partager. C’est nous qui l’avons payée. On pourra leur rendre leur séchoir, si vraiment ils insistent.

(soupir fatigué de Theresa.)

Mais de quoi les colocataires parlent-ils ? De la machine à plier le linge.

Nouveau Graal de notre vie moderne et trépidante, la machine à plier le linge promet de nous affranchir de la corvée du pliage de linge. Fini les chemises froissées parce qu’on ne sait jamais où mettre la manche quand on la plie, fini les pulls qu’on laisse sur cintre et qui prennent toute la place dans la garde-robe parce qu’on a la flemme de les replier. Il n’y aura plus qu’à tout donner à la machine et puis BASTA !

Là, tout de suite, vous vous doutez bien que tout ça n’est que mirages et marketing.

Pourquoi ? Mais parce qu’il faut bien quelqu’un pour mettre le linge dans la machine. Ah vous pensiez tout taper en boule dedans et partir faire autre chose pendant 1 heure ? Eh bien non : il faut alimenter la machine pièce par pièce. Et, pour chaque, attendre à peu près 12 secondes que la bête ait eu le temps de plier qu’on lui a donné à plier avant de pouvoir introduire une nouvelle pièce.

12 secondes. Qu’est-ce qu’on ne peut pas plier en 12 secondes avec un peu d’habitude ? Même moi je crois que je peux plier une chemise en 12 secondes. Et je prends moins de place que ce truc qui ressemble à une photocopieuse. [1]

Pire :  la chose n’accepte ni les trucs trop épais, ni trop grands, ni trop petits.

Et, juste pour être clairs : ça ne fait que plier le linge. C’est-à-dire que tout le reste, à savoir laver le linge sale, le sécher et bien évidemment, repasser les vêtements, tout ça, ben, la machine ne le fait pas. Or, à choisir, je ne sais pas vous, mais moi, un truc qui repasse, je crois que ça m’intéresse plus qu’un truc qui plie.

Bref, c’est gros, c’est lourd, ça coûte 980$ et c’est difficile.

Heureusement, la technique pense à tout, car il existe aussi la machine à défroisser le linge.

On a même vu passer une machine qui défroisse ET plie le linge. Mais elle ne semble pas près de sortir.

Nous en tout cas, on n’a pas fini d’écrire un coin satirique.

 

[1] Une présentation de la bête ici : www.lesnumeriques.com

 

Dernière mise à jour
21 mars 2019
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