À force de répondre à des exigences techniques et de sécurité, les vêtements d’extérieur peuvent être polluants et toxiques.
Imperméabilité, respirabilité, résistance à l’abrasion et aux rayons UV, légèreté, évacuation de l'humidité, traitements anti-odeur… Les vêtements d’extérieur doivent être confortables et répondre à des exigences techniques et de sécurité pour être portés dans des pratiques ou des conditions parfois extrêmes.
Mais leur production est très polluante, plus encore que celle des vêtements classiques. Sans compter les problèmes d’éthique lors de la fabrication et de respect de la santé du consommateur. Le secteur montre parfois une évolution dans le bon sens mais a encore beaucoup de progrès à faire.
> Lire : Comment choisir des vêtements d'extérieur éco-responsables ?
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De nombreux textiles d’extérieur sont fabriqués à base de matières synthétiques. Leurs avantages sont nombreux mais le polyester, le polyamide, l’acrylique ou encore l’élasthanne sont issus de ressources fossiles. Cette ressource non renouvelable est utilisée en grande quantité : il faut environ 1,5 kg de pétrole pour fabriquer 1 kg de polyester.
Leur transformation nécessite aussi beaucoup de substances chimiques et de solvants. Certaines resteront fixées aux fibres même après lavage et ne pourront être éliminées qu’à grandes quantités de solvant, comme les huiles siliconées utilisées lors de la synthèse de l’élasthanne. [1]
Mais il ne suffit pas de se rabattre sur les fibres naturelles pour résoudre tous les problèmes. Le coton conventionnel est gourmand en eau et en pesticides. Le mulesing[2], pratiqués sur les moutons mérinos, va à l’encontre du bien-être animal. Sans compter que la production dans les pays éloignés doit idéalement satisfaire à des normes éthiques.
Heureusement, des alternatives se développent : coton bio, textiles synthétiques recyclés, productions éthiques…
> Voir quelles matières choisir pour les vêtements de plein air ?
Filage, tissage, pré-traitement, désencollage, teinture… Toutes les étapes qui permettent d’aboutir à une veste ou un t-shirt nécessitent de l’eau, de l’énergie, des substances chimiques… D’autant que les textiles plein air doivent répondre à beaucoup d’exigences. Ils doivent être respirants et imperméables, résistants et légers, anti-odeurs… Ces performances techniques ont bien souvent un coût pour l’environnement. Et certains composants ou traitements sont particulièrement polluants.
De nombreux vêtements outdoor sont imperméables, un avantage indispensable quand il pleut. Pour arriver à ce résultat, il faut utiliser des imperméabilisants sous forme de pâtes d’enduction comme le polychlorure de vinyle, le polyuréthane, le silicone, l’acrylique… Appliquées sur toute la surface du vêtement puis fixées grâce à la chaleur, elles augmentent aussi la résistance mécanique des textiles. Mais cette étape de la fabrication émet dans l’air des produits dangereux pour la santé des travailleurs exposés (des COV notamment).
Les PFC (des composés perfluorés) font beaucoup de bruit. Ils sont largement utilisés par l’industrie des vêtements d’extérieur[3] pour assurer étanchéité et résistance. On en trouve par exemple dans les vêtements de pluie, de ski, les gants…[4]
Ces substances chimiques sont disséminées dans la nature lors de la fabrication et de l’utilisation des textiles. Une fois dans l’environnement, il leur faut plusieurs centaines d’années avant de se dégrader. Greenpeace en a retrouvé dispersés partout dans le monde, dans des échantillons de sang humain et jusque dans les lacs les plus reculés.
Côté santé, il n’y a aucune preuve de risque direct quand on porte une veste contenant des PFC. Mais puisqu’ils se répandent dans l’environnement, on peut en ingérer quand on mange ou qu’on respire de l’air contaminé… Étant donné que des effets hormonaux, des tumeurs et d’autres problèmes ont été constatés sur les animaux, le principe de précaution devrait être appliqué : on préfère les vêtements garantis sans PFC.
En 2015 à Madrid, 200 scientifiques ont appelé la communauté internationale à l'élimination des produits contenant du PFC, textiles compris.[5] Pour eux, la situation est comparable à celle ayant mené à l'élimination des CFC responsables de la destruction de la couche d'ozone. L’abandon des produits chimiques fluorés et le développement de substances alternatives constituent donc à la fois une urgence et un défi scientifique qui nécessite la collaboration de tous les acteurs.
Les nanoparticules sont utilisées dans les vêtements de sport pour leurs nombreuses fonctionnalités : protection contre les UV, résistance aux taches, au rétrécissement… Des nanoparticules d’argent sont par exemple intégrées aux fibres des vêtements pour limiter les odeurs et lutter contre les bactéries.
Si l’impact sur la santé des nanoparticules est encore à démontrer clairement, les effets sur l’environnement sont plus clairs. Libérées dans les eaux usées lors du lavage et du rinçage, ces particules ont des effets néfastes sur les organismes aquatiques et terrestres : mortalité, inhibition de croissance, génotoxicité, reprotoxicité, etc.
Beaucoup de textiles technique sont en fibres synthétiques. Or, quand on lave ses vêtements, il y a toujours des fibres qui se détachent et sont emportées avec les eaux usées. En moyenne, le lavage d’une veste libère entre 0 et 2g de microfibres dans les eaux de lavage.[6] Une partie échappe aux stations d’épuration et se retrouvent, avec les composés chimiques qu’elles contiennent, dans les rivières puis les océans. Les organismes aquatiques risquent alors de les consommer, ce qui nuit à leur santé.
Source : Environ. Sci. Technol. 2016, 50, 21, 11532-11538
via Environmental Science & Technology
Toutes les substances toxiques doivent être traitées avant d’être rejetées dans l’environnement. Mais ce n’est pas toujours le cas et les composés se retrouvent dans les eaux usées et sont rarement éliminés par les stations d’épuration.
Pour de nombreuses marques, « le contrôle de l’impact environnemental de la production est inexistant, tout comme les efforts visant à les atténuer ».[7] Même si les choses ont tendance à évoluer dans la bonne direction sous l’influence des consommateurs et de diverses organisations, beaucoup d’initiatives ne sont encore prises que sur base volontaire.
Les textiles d’extérieur peuvent contenir des substances qui font polémique, parfois à des doses supérieures à celles autorisées par les réglementations. On les ajoute dès la fabrication ou lors du stockage et/ou du transport.[8] Mais ce n’est pas le cas de tous les vêtements.
Quelques exemples :
De nombreux vêtements de plein air proviennent de pays asiatiques à bas salaire : Cambodge, Chine, Vietnam, Bangladesh… Les grandes marques ne sont pas en reste selon Test-achats[11] avec des productions dans des conditions déplorables : salaire plancher, heures supplémentaires non payées, horaires excessifs, conditions de travail difficiles, contrat à renouveler tous les deux ou trois mois, licenciement abusif… Il arrive fréquemment que ces conditions de travail mènent à l’évanouissement, voire à la mort. La faute à la pression exercée sur les coûts, comme souvent dans l’industrie textile.[12]
Test-Achat déplore le manque de transparence : « le consommateur n’a qu’à croire l’entreprise sur parole ».[13] Les entreprises refusent par exemple souvent de publier les listes des usines auxquelles elles font appel quand elles ne produisent aucun de leurs vêtements elles-mêmes. Elles confient alors toute la fabrication à des sous-traitants tenus secrets.
Heureusement, certaines marques communiquent sur leurs initiatives : pas de travail des enfants, pas de discriminations, respect des horaires et des travailleurs…
> Lire : Quelles marques de vêtements sont vraiment transparentes ?
L’intérêt des vêtements d’extérieur se trouve le plus souvent dans leurs propriétés : imperméable, évacuant la transpiration… Mais les allégations des marques relèvent parfois du marketing uniquement.
Les propriétés anti UV sont généralement correctes mais pas toujours les propriétés thermiques. De même, « les analyses n’ont pas mis en évidence les propriétés antibactériennes et antiacariennes (absence d’indication de la substance biocide utilisée ou d’efficacité) et les propriétés anti-transpiration », selon un rapport de la DGCCRF.[14]
On se méfie aussi des marques qui basent leur communication sur un unique produit « propre » mais ne font rien pour améliorer le reste de leur gamme, pour laquelle elles continuent à appliquer des exigences environnementales et sociales dérisoires.
Les vêtements de sport en plein air se démocratisent. Leur usage dépasse le simple sport, on en achète aussi comme vêtements quotidiens. Pourtant, ils nécessitent toute une série de traitements non écologiques qu’on n’applique pas aux vêtements habituels. Ces super performances techniques sont-elles vraiment utiles pour « affronter » la vie de tous les jours ?
Comme on se met à les porter dans la vie de tous les jours, des critères classiques commencent aussi à orienter le choix d’achat et on se laisse plus facilement influencer par la mode et ses fantaisies. Les collections se renouvellent rapidement, le consommateur est tenté et incité à surconsommer. Or, il faut au moins 5 ans pour amortir l’impact environnemental moyen d’un vêtement outdoor. [15]
Le consommateur réduit aussi souvent la durée de vie des vêtements techniques par un mauvais entretien. Par exemple en les laissant traîner humides, ce qui cause l’apparition d’odeurs et de moisissures.
Enfin, il en va des vêtements outdoor comme de tous les biens de consommation : on s’en débarrasse trop facilement. Si une veste perd son imperméabilité, qu’on fait un accroc dans un t-shirt en laine mérinos ou qu’une tirette casse, on jette au lieu de réparer. Pourtant, vu le prix de bons vêtements techniques, la réparation est souvent avantageuse. Et les marques améliorent de plus en plus ce service après-vente.
> Plus d’infos sur l’entretien, les garanties et les réparations des vêtements outdoor.
[1] Source : WWF
[2] Le museling, pratiqué en Australie, consiste à découper d'énormes morceaux de peau de l'arrière-train des agneaux dans une tentative malavisée de contrôler les vers (myiases) chez les moutons.
[3] Selon le Ministère danois de l’environnement, 50% de la production des PFC volatiles, les FTOH, sont destinées à l’imprégnation de produits textiles. 90% des textiles testés par Greenpeace en contenaient, dans leurs analyses de 2016. Source : Greenpeace.
[4] Selon une étude danoise de l’EPA sur les PFA dans les textiles pour enfants. Les PFA identifiés sont PFSA, PFCA, FASA, MeFASA, MeFASE, EtFASE, FTCA, FTAC, FTMAC.
[6] Hartline, N.L., Bruce, N.J., Karba S.N., Ruff, E.O., Sonar, S.U., and Holden, P.A. (2016) Microfiber Masses Recovered from Conventional Machine Washing of New or Aged Garments, Environmental Science & Technology, Vol. 50, No.21, pp.11532-11538
[7] Source : Test-Achats 610 (2016).
[8] Des substances chimiques peuvent être ajoutées lors du transport des textiles, pour maintenir les couleurs ou prévenir la prolifération de moisissures. Test-Achats renseigne par exemple le diméthylfumarate, un fongicide, qui est interdit en Europe mais autorisé en Asie. Celui-ci est pulvérisé ou incorporé dans les emballages de textiles pour le transport (Plus d’infos : Test-Achats)
[9] Évaluation des effets sensibilisants ou irritants cutanés des substances chimiques présentes dans les articles chaussants et textiles d’habillement, Anses, 2018
[10] NPEO, colorants, chrome, 1,4-paraphénylène diamine… selon une étude de l’Anses, dans les textiles d’habillement utilisés dans des conditions où le phénomène de transpiration est majeur (ex activité sportive)
[12] Plus dinfos sur le site d’Achact.
[13] Test-Achats 610 (2016).
[14] Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes dans Enquête sur la loyauté et la sécurité des textiles-habillement
[15] Source : Sustainable Clothing Guide 2017
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