Peut-on boire l’eau du robinet sans danger pour la santé ? L’eau distribuée est très contrôlée mais certaines substances posent question.
L’eau du robinet est très contrôlée. On l’analyse plusieurs milliers de fois par an d’après 55 critères de qualité. Ce qui garantit une eau potable de très bonne qualité.
Malgré tout, certains éléments sont régulièrement pointés du doigt, comme le calcaire, les résidus d’hormones et de médicaments, les nitrates, les pesticides, l’aluminium, le plomb ou le chlore. On retrouve certaines de ces substances dans l’eau du robinet (et aussi dans l’eau en bouteille).
Ces résidus viennent du rejet des eaux usées (élevage, notre utilisation « ménagère » de médicaments et d’hormones, hôpitaux…).
Actuellement, il n’existe aucune norme européenne réglementant ces substances dans l’eau du robinet. Cela ne fait donc pas partie des paramètres à contrôler.
Test-Achats a cependant démontré, analyses à l’appui, qu’il n’y en avait pas ou très peu dans l’eau du robinet.1 Mais cela reste un point d’attention à surveiller. La Wallonie y travaille.
Aux concentrations minimes retrouvées, non.2 Mais on manque de recul sur l’impact de ces microdoses.
La présence de nitrates au-delà de 10mg/litre est considérée comme venant de l’activité humaine (engrais, rejets d’eaux usées…). En-dessous on considère que cela provient de l’environnement « vierge ». Il est donc important que chacun veille à préserver la qualité de l’eau.
La limite légale est de 50mg de nitrates par litre d’eau du robinet. En Belgique, la plupart des eaux sont significativement en-deçà de cette norme : un tiers sont entre 0 et 10, un tiers entre 10 et 25 et un tiers entre 25 et 50. 3
Seuls 10% des captages dépassent cette valeur.4 En cas de dépassement, l’eau du captage incriminé n’est pas distribuée. Elle peut être traitée ou mélangée à d’autres eaux contenant moins de nitrates.
Les eaux en bouteille contiennent aussi des nitrates, mais généralement moins : entre 0,01 et 6,2 mg/litre.5 Donc moins que ce que l’on trouve dans la plupart des eaux du robinet.
Oui et non.
Des bactéries dans notre corps transforment les nitrates en nitrites. Ces nitrites se combinent avec des amines (composés azotés) pour former des nitrosamines cancérigènes pour l'homme. Chez les nourrissons, la transformation de nitrates en nitrites se fait plus rapidement. Les nitrites empêchent l'oxygénation normale de l'organisme. Cela peut entraîner la méthémoglobinémie (ou syndrome des bébés bleus), une maladie rare pouvant causer des dommages au cerveau, voire la mort.
Mais selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la norme de 50mg/l est sûre pour les femmes enceintes et les nourrissons.
Il faut d’ailleurs mettre ces chiffres en perspective : selon un rapport de l’Afssa (l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments), l’eau de boisson qui contiendrait 20mg/l de nitrates n’apporterait qu’environ 10% des apports journaliers en nitrates. Le reste vient d’autres sources, comme les légumes (entre autres les betteraves, radis, salades, pommes de terre…) ou la charcuterie.
Ils ne sont pas présents naturellement dans l’eau mais viennent de l’activité humaine : l’agriculture bien entendu, mais également les utilisations par les particuliers ou les services communaux. D’où l’importance de l’interdiction d’utilisation de pesticides dans de nombreuses situations (notamment dans l’espace public).
La somme de toutes les traces de pesticides dans l’eau du robinet ne peut pas dépasser 500ng/litre (500 nanogrammes = 0,0005 milligramme/litre). La norme prévoit aussi de ne pas dépasser 100ng/l pour chaque pesticide (voire moins pour certaines molécules). C’est bien moins que ce qui est prévu pour les résidus de pesticides sur les fruits et légumes (10 000 ng/kilo)6.
Les taux habituellement relevés sont d’ailleurs rassurants et bien en-dessous de la norme. Quelques relevés pris au hasard dans les résultats d’analyses d’eaux distribuées à Namur, Villers-le-Bouillet, Charleroi et Spa montrent des pesticides totaux entre 7 et 22 ng/litre7 8 et entre 7 et 12 pour Bruxelles9.
Et ce n’est pas parce que l’eau est en bouteille qu’elle est épargnée. On retrouve également des traces de pesticides (de l’ordre du nanogramme également) dans des eaux en bouteille.10
Les normes sont telles que les niveaux des résidus ne posent pas de problème pour la santé. Mais comme pour les hormones ou les médicaments, on manque de recul quant à l’effet de microdoses, souvent mélangées.
L’eau du robinet vient à 80% de ressources souterraines. C’est notamment ce qui fait sa grande qualité. Mais le sous-sol wallon est très calcaire. L’eau se charge donc naturellement de ce calcaire lorsqu’elle est filtrée par le sol.
Le calcaire n’est pas un problème pour la santé humaine.
Par contre il se dépose partout, surtout lorsque l’eau est chauffée. Cela peut nuire au bon fonctionnement de certains appareils électroménagers.
Utiliser un adoucisseur permet de réduire le calcaire dans l’eau. Mais les adoucisseurs ajoutent du sel, consomment de l’eau, doivent être entretenus etc. L’eau adoucie est donc déconseillée aux personnes souffrant déjà d’hypertension.
Avant de mettre en place un adoucisseur, il y a plusieurs astuces à tester !
Il est naturellement présent dans l’eau du robinet de certaines régions (combinaison de certaines roches avec de l’eau plutôt acide). En Belgique, ces zones sont dans l’Est du pays. Il peut également provenir des eaux qui ont été traitées chimiquement (eaux de surface essentiellement).
Oui, il porte atteinte au système nerveux. Par contre, son effet ne s’est manifesté que dans les cas de forte exposition chronique.10
Selon l’Anses (Agence nationale – française - de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), l’eau ne contribue que très peu à l’apport en aluminium dans notre alimentation.11 Il provient en grande partie des ustensiles en aluminium qu’on utilise pour cuisiner.
Le plomb vient surtout des conduites en plomb. L’eau se charge en plomb quand elle « stagne » dans les tuyaux (pendant la nuit ou les vacances…).
Il n’y a presque plus de conduites en plomb dans le réseau de distribution (1,2% fin 2016).12 Ce sont donc surtout les canalisations intérieures aux bâtiments qui sont responsables de la pollution de l’eau par le plomb (surtout pour les anciennes maisons d’avant 1950 non rénovées).
Oui. L’intoxication au plomb s’appelle le saturnisme. Les problèmes de la santé vont de simples troubles digestifs à l’atteinte du système nerveux.
L’idéal est de remplacer toutes les conduites en plomb. On évite ainsi tout risque de contamination. Vous n'avez toutefois aucune obligation de le faire. Mais à l’avenir chaque habitation devrait être accompagnée d’une sorte de certificat renseignant la présence ou non de conduites en plomb.12
Pas possible de les remplacer ? Alors laissez couler l’eau qui a stagné dans les tuyaux avant de la boire. Cela permet d’éliminer presque tout le plomb dans l’eau. En début de journée ou après une longue absence, on prend donc une douche ou on va au petit coin avant de se servir un verre d’eau ou de remplir la cafetière ou la bouilloire. La quantité d’eau à utiliser avant de la boire dépend de la longueur de tuyau où l’eau a stagné. Par exemple, un tuyau de 10m de long et de 20mm de diamètre contient un peu plus de 3 litres d’eau. Et concrètement, si on habite une maison qui est à 10m de la rue, il faut compter ces 10m + la longueur du trajet effectué par le tuyau d’arrivée d’eau jusqu’au robinet (en espérant que la maison ne soit pas au bout d’une rue de 100m de long où tous les voisins sont partis en vacances).
Attention, les adoucisseurs sont à exclure si les tuyauteries sont en plomb ! En effet, l'eau adoucie (acide) augmente encore la migration de plomb vers l’eau.
Le chlore n’est pas présent naturellement dans l’eau, il est ajouté pour garantir une bonne qualité bactériologique à l’eau pendant toute sa distribution. Seules 4% des eaux du robinet ne sont pas désinfectées au chlore (ou pas désinfectées du tout)3.
On accepte jusqu’à 0,25 mg/l de chlore résiduel dans l’eau distribuée (aux USA, la norme est à 4mg/l). L’eau ne présente pas d’excès dans 90% des cas. En fonction des captages et des distributeurs, l’eau est plus ou moins chlorée : certains vont jouer la sécurité quitte à ce que l’eau ait une odeur de chlore prononcée, d’autres seront plus légers sur les quantités injectées.
Le chlore en lui-même s’évapore très facilement. Mais en contact avec les matières organiques de l'eau (bactéries par ex.), il forme des substances (THM) suspectées d’être cancérigènes13. Ces substances sont également reprises dans les paramètres de qualité à respecter impérativement par l’eau distribuée. L’OMS considère cependant que l’on est exposé à ces substances autant par la nourriture et par l’air intérieur des habitations que par l’eau que l’on boit. Une heure de piscine nous exposerait même à des taux bien plus élevés (100x) 14.
Cela dit, ce sont des molécules à garder à l’œil. La norme a même été abaissée les dernières années.
Ces THM sont volatils et diminuent très fortement si l’eau est chauffée ou gardée au frigo pendant 24h.
[1] En 2013. En 2016 une nouvelle analyse a montré que 2 prélèvements contenaient des traces très faibles d’une hormone.
[3] Qualité de l’eau destinée à la consommation humaine – rapport SPW 2010-2012.
[4] http://www.aquawal.be/fr/nitrate-et-eau-de-distribution.html?IDC=607 . L’eau n’est donc pas distribuée telle quelle.
[6] Qu’on peut certes nettoyer avant consommation. 45% des fruits et légumes vendus en Belgique contiennent des résidus de pesticides.
[7] Source : www.swde.be pour le centre de Namur, de Charleroi et de Spa (eau de surface dans ce dernier cas). Janvier 2017.
[8] Par exemple, le seuil de toxicité du Terbuthylazine est de 7000 ng/litre (OMS dans « Qualité de l’eau destinée à la consommation humaine – rapport SPW 2010-2012 ».)
[10] Selon une étude du CNRS à la demande de minéraliers français, 22% des eaux analysées contiennent des traces de pesticides. https://eaumineralenaturelle.fr/qualite/qualite-de-leau-en-bouteille
[13] Groupe 2B selon le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer).
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