Durable ? C'est alimentaire !
Manger, voilà bien un acte on ne peut plus naturel, du moins pour la majorité de la population du monde occidental. Mais ce geste naturel est beaucoup plus compliqué qu’il n’y paraît, lorsque l’on s’attarde sur les aspects « durables » de notre alimentation.
Alimentation durable, késako ?
Dans les grandes lignes, on entend par alimentation durable une alimentation qui respecte toute une série de critères environnementaux (dans le but de diminuer l’impact de l’alimentation sur notre environnement), éthiques (pour permettre aux producteurs «du Sud» de percevoir une rémunération normale) et de santé (afin de consommer des aliments qui sont favorables à notre santé).
On privilégiera donc des produits locaux et de saison, issus de l’agriculture biologique, peu emballés et/ou pour lesquels le producteur perçoit une rémunération équitable, plutôt que le maxi menu du premier fast-food venu.
Mais en pratique, comment faire en sorte que les aliments que nous choisissons respectent ces différents critères ? Petit tour - de table bien sûr - des principales questions de l’alimentation durable. Nous nous attarderons plus spécifiquement sur les aspects «environnement», même si ces aspects ne sont pas exclusifs.
Des produits locaux et de saison !
En ces temps de « pénurie » énergétique, voilà deux critères primordiaux ! En effet, un aliment produit à proximité du lieu d’achat nécessitera logiquement moins d'énergie qu’un autre venant de l’autre bout de la planète. Même chose pour les aliments locaux mais hors saison, produits à l’aide de serres chauffées.
Les aliments produits loin du lieu de vente ne sont malheureusement pas rares, que l’on parle de chips produits en Malaisie, de haricots égyptiens, de bière mexicaine, de biscuits suédois, de fraises ou de tomates en hiver... Cela se comprend encore quand on consomme des aliments exclusivement produits à l’étranger et/ou en petite quantité (encore que…), comme les ananas ou comme la spécialité alimentaire de tel ou tel pays. Mais cela devient carrément obscène énergétiquement parlant lorsqu’il s’agit d’aliments que l’on pourrait produire localement plutôt que de les importer à grands coups de tonnes de CO2 relâchées dans l’atmosphère.
Selon le Crioc, un kilo d’ananas frais nécessite ainsi deux litres de carburant pour venir, par avion, du Ghana jusqu’en Belgique. Cela représente cinq kilos de CO2… De même, une préparation de poulet « Hawaï » totalisait entre 15.000 et 60.000 km de trajet pour ses différents constituants. Le tour du monde dans votre assiette en somme, avec un arrière-goût de dilapidation des ressources naturelles.
Le caractère saisonnier des fruits et légumes est plus facile à appréhender, du moins si l’on est pas déconnecté des saisons, comme c’est souvent le cas du consommateur moderne habitué à trouver de tout, tout le temps. Perdu parmi les choux et les carottes ? Consultez notre liste de calendriers ! (voir en fin d’article).
L’alimentation bio, durable par définition !
En ce qui concerne le type de production, on préférera des produits issus de l’agriculture biologique, qui garantit un mode de production sans engrais chimiques ni pesticides. C’est important d’un point de vue environnemental, l’utilisation immodérée d’engrais et de pesticides conduit à la pollution de l’environnement (air, nappes d’eau potable, cours d’eau de manière générale etc).
Moins de viande, plus de légumes !
Le Belge consomme, en moyenne, 270g de viande par jour. Si cela se situe dans la moyenne européenne, cela reste malgré tout deux à trois plus élevé que ce qui est régulièrement recommandé. Ce n’est pas sans conséquence sur la santé et l’environnement. Un kilo de viande nécessite en effet près de 10 kilos d’orge ou de blé pour être « fabriqué ». Mieux vaut réduire cette consommation et alterner viandes rouges et blanches (volaille…), poissons, œufs, fromages et protéines végétales (soja, pois chiches, lentilles).
Du poisson ? Oui mais pas n’importe lequel !
On parle souvent du poisson comme « alternative » à la viande et comme aliment «meilleur pour la santé». C’est vrai mais d’un point de vue durable, ce n’est pas à prendre au pied de la lettre. En effet et contrairement à la plupart des autres produits alimentaires, le poisson que l’on mange est toujours principalement issu de la pêche (à 80%), c’est-à-dire un prélèvement effectué dans la nature, comme si l’on devait chasser les vaches pour avoir de la viande.
Malheureusement ce prélèvement dépasse les capacités du milieu naturel. En effet, selon la FAO, certaines espèces de poissons ont déjà disparu (7%), certaines sont en cours de reconstitution (1%) et d’autres (52%) sont pleinement exploitées, c’est-à-dire qu’une faible augmentation de la pêche menacerait l’équilibre de reproduction de ces poissons.
L’aquaculture n’est qu’une partie de la solution, notamment car elle ne s’effectue pas actuellement de la manière la plus durable possible.
Que choisir ? Préférer les poissons labellisés "fish forever", bio ou encore MSC (Marine Stewardship Council). Le WWF a édité un guide pratique pour que le choix soit plus facile (voir en fin d’article).
Des aliments issus du commerce équitable
La consommation durable passe également par des produits issus du commerce équitable, qui rémunère le producteur de manière… équitable. Actuellement ces produits sont de plus en plus faciles à trouver, même dans les grandes surfaces. Les critères de choix sont ici assez évidents à suivre, en ce sens qu’il « suffit » d’acheter des produits portant la labellisation Max Havelaar ou Oxfam. D’autres certifications existent, mais à notre connaissance ce sont les deux principaux en Belgique, principaux et dignes de foi.
Quel type d’emballage préférer ?
Pour l’emballage, le critère est facile à respecter : il suffit de regarder le produit pour savoir si oui ou non il est très emballé, voire, si l’on regarde de plus près, le type d’emballage (plastique, carton, verre…). On privilégiera donc des aliments en vrac, en grand conditionnement ou emballés avec des emballages recyclables et/ou réutilisables (emballages biodégradables, consignés, composés essentiellement de carton qui pourra être recyclé etc). Sachant que l’on produit grosso modo 500 kilos de déchets par an et par personne, dont plus de 30% du poids (et 50% du volume) sont des emballages, faire attention à l’emballage est plus que nécessaire !
Le critère universel : le gaspillage !
Voilà bien un critère universel. Quel que soit l’aliment et la façon dont il a été produit ou transporté, quoi de moins durable que de gaspiller de la nourriture ? Entre 10 et 18%, selon les sources, de la poubelle tout venant des Bruxellois sont des aliments ! Une partie de ces aliments est entamée et certains sont encore intacts ! Le pire est que ce gaspillage s’élève encore à 8% si on exclut les restes de repas. Bon à savoir : certains aliments sont encore tout à fait consommables une fois la date dépassée ! (voir en fin de page). Des recettes existent également pour accommoder les restes.
Quoi d’autre ?
Les quelques points abordés dans cet article ne sont pas les seuls qui existent en matière d’alimentation durable. En effet, on pourrait y rajouter des critères spécifiquement sociaux (allongement de la durée de vie des populations, maintien du monde rural, aggravation des inégalités sociales…). On aurait également pu parler des additifs alimentaires, des OGM, des « crasses » alimentaires (plus communément appelée junk food : chips, sodas, hamburgers…), des relations entre agriculteurs et industriels, de la question du terroir, des aspects économiques etc.
Pour avoir une idée de ces autres aspects et de ce qu’en pensent les consommateurs européens, nous vous renvoyons vers le tout récent rapport de la Fondation Roi Baudouin sur les Européens et l’alimentation durable (cf. adresses utiles). Pour les aspects santé, découvrez le tout dernier site du Crioc sur "nutrition et santé" : www.nutrition-sante.be
Quels critères retenir ?
Il n’est pas évident de « classer » les priorités d’achat. Doit-on préférer un produit bio emballé ou son pendant non bio mais disponible en vrac ? Doit-on préférer de la bière produite en Europe par un grand groupe brassicole ou de la bière issue du commerce équitable mais qui a fait des centaines voire des milliers de kilomètres avant d’arriver dans nos rayons ? On n’a souvent pas le choix, tout simplement. Par définition il n’est d’ailleurs pas possible de trouver un produit issu du commerce équitable qui soit également bio, produit en Belgique et peu emballé.
Il nous reste donc à faire des choix, à moduler en fonction des produits. Quand on souhaite acheter du café et comme ce n’est de toutes façons pas produit en Europe, autant en acheter de l’équitable, voire du bio équitable. A contrario, autant acheter une pomme belge non bio que son homologue bio qui viendrait d’Argentine.
Et parfois, ne pas acheter tout simplement, parce qu’il n’y a pas de solution «acceptable».
Bon appétit !
Bibliographie & adresses utiles
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