L’écologie s’invite partout et c’est une bonne chose. On pourrait dire aussi qu’il était temps. Mais du coup ça donne des envies à certains de surfer sur la vague.
 

Aide-nous à recycler !

Tel est donc le cri (publicitaire) lancé récemment par Coca-cola. En effet, cette petite PME s’engage à recycler 100% de ses emballages et à utiliser au moins 50% de plastique recyclé dans ses bouteilles en plastique d’ici 2025 au plus tard. Mais pour atteindre cet objectif, la marque a besoin de nous. Elle nous demande de bien mettre nos bouteilles et canettes au recyclage.

Fichtre, en voilà un défi sociétal d’envergure ! Peuples de tous les pays, réjouissez-vous !

Ou pas.
 

L’art de ne surtout rien changer

Vu l’ampleur de la campagne, qui se lit jusque sur les étiquettes des bouteilles, on s’attendait à de grandes choses :

  • Par exemple, que le producteur passe à un système de bouteille réutilisables, meilleures pour l’environnement d’après les écobilans[1].

    Il appliquerait ainsi la hiérarchie européenne de gestion des déchets (« le meilleur déchet est celui qui n’existe pas ») et suivrait au passage le conseil que même la banque britannique HSBC lui aurait donné (à savoir revenir à des bouteilles réutilisables).[2] La marque laissera ainsi le plastique à des usages plus intéressants que des bouteilles à jeter.

    -> Mais non, on reste sur la même bouteille jetable.
     
  • Ou encore que la marque atteigne des taux de recyclage terriblement ambitieux et novateurs.

    -> Bof. La campagne se limite à la Belgique et aux Pays-Bas. Or, on recycle déjà plus de 80% des bouteilles et flacons en plastique chez nous (notre fameux sac bleu). Et de toutes façons l’Europe imposera 90% de collecte des bouteilles en 2030 (sur TOUTE l’Europe). Ou comment enfoncer des portes ouvertes…
     
  • Alors peut-être que la multinationale va vers de l’économie circulaire, où chaque gramme de plastique collecté deviendrait un gramme de nouvelle bouteille ? Logique puisque la marque vante son « 100% de recyclage ».

    -> Encore raté. Ils ont dû oublier de préciser que le recyclage du plastique est encore problématique, surtout pour en faire des emballages alimentaires. Voir pourquoi le recyclage n’est pas la panacée.
     
  • Bon à tout le moins, le fabricant va quand même augmenter drastiquement la part de plastique recyclé dans ses emballages ?

    -> Comme beaucoup d’autres marques en fait… vu que l’Europe imposera l’utilisation de 25% de plastique recyclé dans les bouteilles d’ici 2025.
     

Voir au-delà du plastique

Est-ce que pour autant ces objectifs ne sont pas intéressants ? Non, bien sûr. Cela va plus loin que ce que l’Europe impose(ra) en matière d’emballages. [3]

En matière d’emballages.C’est là que le bât blesse. Coca-Cola utilise un aspect de son fonctionnement pour en faire une sorte de message global qui ressemble à s’y méprendre à un engagement environnemental d’envergure, ce que ce n’est clairement pas. Vous avez dit greenwashing ?

C’est oublier tout le reste.

Oublier qu’on utilise massivement du plastique jetable. Et que là où le plastique est mal collecté, c’est un désastre environnemental.

Oublier qu’on utilise ces emballages pour emballer un truc inutile, à savoir de l’eau sucrée aromatisée vendue à vil prix.[4]

Oublier que ça contient plein de colorant caramel décrié pour ses risques cancérigènes.

Oublier que des populations manquent d’eau à cause de la production de la marque dans certains pays.[5]

Oublier que Coca-Cola a massivement milité contre les politiques visant à augmenter les taux de collecte et de recyclage des emballages.[6]
 

N’achète pas Coca si tu ne nous aides pas à recycler

Essayons un peu de logique :

  1. Puisque la marque considère que l’on doit recycler pour pouvoir acheter son produit (c’est limite condescendant, quand on y pense, elle, grande marque qui se retrousse les manches, toi, petit consommateur qui ne fait rien qu’à l’embêter en ne triant pas tes emballages).
  2. Vu que le recyclage n’est pas la panacée, mais seulement la troisième étape dans la gestion des déchets (après la prévention et la réutilisation).

La meilleure solution serait encore de ne pas acheter ce produit. Finalement, ce serait complètement raccord avec le slogan.

Vous voyez, on est d’accord !


> Intéressé de vraiment diminuer l’usage du plastique ? Lisez plutôt notre article Comment réduire la pollution due au plastique ?

 

[1] Ce que montrent tous les écobilans qu’on a déjà eu l’occasion de lire à ce sujet. Petit résumé dans notre article sur les emballages de boissons.

[3] Si du moins cela se concrétise. Des objectifs ambitieux avaient déjà été annoncés par le passé, sans se retrouver dans les faits (cf. Cash Investigation, janvier 2018).

[4] À 1,4€ du litre, ce qui est presque génial, quand on y pense. C’est plus cher que du jus de pomme de marque distributeur. Et presque au même prix, à quelques cents près, que le jus de légumes bio (prix Colruyt, juin 2019). Et encore, 1,4€ du litre, c’est sur base de bouteilles d’1,5 litre. Sinon, c’est encore plus cher.

Dernière mise à jour
01 juillet 2019

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