On retrouve typiquement le label Rainforest Alliance sur des produits « du Sud », comme les bananes, le café, ou le chocolat. Il s’agit d’un label de développement durable, dont la fusion avec UTZ certified en 2019, a mené à une révision des critères en 2020.  Que peut-on attendre de ce label ?
 

Avis d’écoconso

Rainforest Alliance est souvent considéré comme un label du commerce équitable. Or c’est plutôt un label global avec différents critères liés à l’économie, l’environnement et le social. Si les principes sont bons, il y a assez peu de seuils stricts à respecter.

L’objectif est surtout d’encadrer des pratiques avec un objectif d’amélioration continue. Un bon exemple est le prix minimum auquel un producteur peut vendre son produit. Alors que ce critère est repris par des labels comme Fairtrade ou Fair for Life, il est inexistant pour Rainforest Alliance. L’amélioration des revenus des travailleurs est assurée autrement, notamment par une amélioration de la rentabilité de l’exploitation.

S’il est préférable de choisir un produit Rainforest qu’un produit non labellisé, Rainforest est moins exigeant que les deux principaux labels « verts » alimentaires : le bio et le Fairtrade. Un produit qui porte ces deux derniers labels respecte plus de critères.

Résumé des critères

La label Rainforest Alliance reprend des critères liés à la gestion d’une exploitation agricole, la traçabilité des produits, l’aspect social (e.a les revenus des travailleuses et travailleurs), l’environnement (protection des écosystèmes, pesticides dangereux…) et l’agriculture. En cela c’est un label assez global.

Pour pouvoir arborer le label[1], les produits transformés doivent être composés de 90% d’ingrédients labellisés.

Produits concernés

Le label Rainforest Alliance porte sur l’alimentation.

Portée du label 

  • des critères environnementaux : oui
  • des critères sociaux : oui
  • des critères liés à la santé : indirectement.
  • des critères liés au bien-être animal : non

Critères du label

En général :

Les critères du label Rainforest Alliance détaillés ci-dessous se répartissent en 6 catégories de critères : gestion, traçabilité, revenu et responsabilité partagée, agriculture, social, et environnement.

Plusieurs des critères sont analysés au travers de ce que Rainforest appelle des « compteurs intelligents ». Il s’agit d’un outil de mesure d’indicateurs (le couvert végétal, le salaire versé…) qui permet au producteur de fixer ses propres objectifs, plutôt que d’avoir des objectifs fixés par Rainforest[2]. Ce système ne vaut cependant que pour les critères d’amélioration progressive, pas pour les critères obligatoires qui sont à respecter strictement.

Le Rainforest fonctionne sur base de 3 grandes catégories d’exigences

  • Critères obligatoires: le critère est respecté ou pas respecté
  • Exigences d’amélioration obligatoires : le critère n’est pas rencontré mais doit l’être à terme après par exemple 3 ans, 6 ans… 
  • Exigences d’amélioration facultatives ou « librement choisies »

On retrouve parmi les principaux critères du label Rainforest Alliance  :

La gestion :

Cette catégorie regroupe des critères liés à une bonne gestion de l’exploitation :

  • La direction de l’exploitation met en œuvre les moyens nécessaires au respect du label Rainforest  comme la mise en place d’un comité de suivi représentatif par exemple, veille au respect des lois en vigueur, maintient une liste des fournisseurs, sous-traitants, travailleurs…
  • Une carte à jour de l’exploitation est disponible, les risques liés à l’activité sont évalués, un plan de gestion ainsi qu’un système d’inspection interne sont mis en place notamment.
  • Il est prévu de suivre un mécanisme de réclamation pour recevoir par exemple les plaintes des travailleuses et travailleurs, et l’égalité des genres est par ailleurs promue.

La traçabilité :

Cette catégorie concerne tout ce qui permet de suivre les produits certifiés tout au long de la chaîne. Et dans ce cas  également les exigences de traçabilité qui incombent au producteur :

  • Le producteur estime sa production future et comptabilise sa récolte effective. En cas de différence supérieure à 15%, il doit fournir une justification.
  • Les produits certifiés doivent être visuellement séparés des autres, sauf s’il s’agit de produits qui sont certifiés sur base d’un bilan massique[3].
  • Les différents intermédiaires sont connus et placés sur une carte afin d’identifier le cheminement des produits crées[4]).
  • Il est interdit de vendre plus de produits certifiés que ce que le producteur possède, ou de réaliser de double vente. Ce qui est en possession du producteur est calculé sur base de la production propre de l’année, le stock de l’année précédente, et l’achat de produits certifiés.  Pour calculer au plus juste, les instruments utilisés de pesée sont vérifiés chaque année, les méthodes de calcul ou de conversion par exemple sont justifiées, et une plateforme de traçabilité est notamment utilisée pour suivre l’encodage des volumes vendus.

Le revenu et la responsabilité partagée :

On y trouve :

  • L’évaluation des coûts de production et du revenu net réel des travailleuses et travailleurs, bien qu’il s’agisse de critères facultatifs.
  • Le paiement obligatoirement en argent du différentiel de durabilité. Cette « prime » doit être distincte d’autres primes éventuelles, et documentée.  Elle est dépensée au profit des travailleur·euses et producteur·ices pour assurer des garanties au niveau salaire, conditions de travail, santé, sécurité, et logement. Le montant du différentiel de durabilité n’est pas prévu par défaut, sauf pour certaines cultures agricoles qui spécifient un minimum.[5]
  • En plus du différentiel, les responsables de l’exploitation prévoient « les investissements nécessaires pour améliorer la durabilité grâce au modèle de plan d'Investissement de durabilité de Rainforest Alliance ». Ce plan est défini après consultation avec les travailleur·euses et les acheteur·euses.

Rainforest n’impose donc pas de prix minimum. L’amélioration des revenus est assurée, selon le référentiel, par le différentiel de durabilité, par des investissements faits pour améliorer la durabilité de l’exploitation, et par une amélioration de la rentabilité de l’exploitation (e.a par un indicateur de revenu vital)[6]. A noter que le différentiel ne bénéficie pas non plus d’un minimum sauf pour les fruits frais et le cacao, les investissements sont fait tant par le producteur que par des « acteurs du marché ». Rainforest assume et justifie ce choix[7].

L’agriculture :

Il s’agit de la production à proprement parler, de la diminution de son impact sur l’environnement et l’augmentation de la résilience face changement climatique notamment.

Parmi les critères de ce chapitre, on retrouve :

  • Sélection de plantes et graines selon leur productivité, résistance aux ravageurs et maladies, et adaptation au climat par exemple
  • Mise en place de mesures de gestion des ravageurs,  cultures intercalaires, rotation des cultures, jachère… ainsi qu’une politique de rénovation des cultures avec replantation, ajustement de la densité, greffage…
  • Utilisation d’un « compteur intelligent » dont l’indicateur est notamment le pourcentage en surface des autres exploitations appliquant les mêmes pratiques de rénovation des leurs plantations. Cela permet à l’exploitation de se situer par rapport aux autres et, selon le score, de potentiellement améliorer ce point par exemple.
  • Interdiction de cultures OGM.[8]
  • Evaluation des sols effectuée au moins tous les 3 ans, et mise en place de solutions pour l’améliorer le cas échéant. Le sol ne peut pas être laissé nu, et les engrais sont appliqués « de telle manière que les nutriments sont disponibles au moment et à l’endroit où les cultures en ont besoin ». Les producteurs mesurent par ailleurs les quantités d’engrais utilisés par rapport aux autres exploitants.
  • Lutte intégrée contre les ravageurs, avec l’utilisation privilégiée de méthodes mécaniques et biologiques, l’utilisation raisonnée de pesticides (basse toxicité, alternance des produits pour éviter des résistances développées par les ravageurs etc.), l’amélioration de l’environnement proche de la culture pour héberger des ennemis naturels des ravageurs… et de manière générale, la tenue de compte afin de consigner les quantités de produits utilisés.
  • Interdiction de certains pesticides selon la loi du pays concerné et une liste de substances définie par Rainforest[9] notamment, formation des travailleuses et travailleurs aux pesticides utilisés, existence de règles d’utilisation des pesticides, et enregistrement des pulvérisations constituant une forme de registre gardant trace du nom du produit, la date, le lieu et la personne qui en fait usage notamment
  • Récolte des produits au bon moment, nettoyage des outils utilisés pour la récolte, utilisation de matériaux d’emballage alimentaires…
  • Respect des limites maximales de résidus (LMR) de pesticides fixés par les pays de production et de destination connus[10], information des acheteurs en cas de dépassement…

Social :

Dans ce chapitre, on aborde tout ce qui touche au salaire, aux conditions de travail, au respect des droits des travailleuses et travailleurs notamment.

Parmi les critères, on aborde:

  • Engagement à évaluer et résoudre le travail des enfants, le travail forcé, la discrimination, la violence et le harcèlement au travail selon les définitions de l’Organisation internationale du travail [11]
  • Atténuation des risques par la mise en place de procédures visant à réduire les risques de travail des enfants, harcèlement notamment grâce à un système de réclamations par exemple.
  • Liberté d’association et de convention collective pour les travailleuses et travailleurs, incluant entre autre l’absence de discrimination ou de représailles envers les personnes qui adhèrent à un syndicat, et la rémunération des heures passées à exercer la fonction de syndicaliste
  • Formalisation de contrats de travail, sous forme écrite pour les prestations de minimum 3 mois consécutifs. Le contrat détermine notamment les horaires, rémunérations, congés payés, et préavis.
  • Paiement du salaire selon le minimum applicable, ou l’échelon supérieur négocié dans la convention collective de travail. En cas de travail à la pièce, le salaire minimum correspond à une semaine de travail de 48 heures (ou moins si la loi prévoit moins). Le paiement est assuré au moins une fois par mois, et enfin à travail égal salaire égal sans discrimination de genre, ethnie, âge, religion…
  • En termes de salaire minimum vital, il n’y a pas de minimum applicable à proprement parler. Si la rémunération totale (salaires et autres avantages) est inférieure à la grille de référence de Rainforest Alliance, et ce conformément à la définition du salaire vital de la Global Living Wage Coalition), la direction met en place un plan d’amélioration des salaires. L’objectif est de « progresser en direction de l'indicateur de référence applicable, comprenant des cibles, des actions, un calendrier et des personnes responsables. »[12].
  • Conditions de travail prévoyant un maximum de 8h par jour, et 48h par semaine. Les heures supplémentaires sont prestées sur base volontaire, à raison de maximum 60 heures par semaine. Un moyen de transport sûr est aussi par exemple envisagé pour assurer les déplacements des travailleuses et travailleurs vers leurs maisons.
  • Droit à un congé de maternité.

La santé et la sécurité :

Les critères reprennent :

  • Analyse des risques : conformité avec la réglementation, formation des travailleuses et travailleurs, procédures et équipements qui garantissent santé et sécurité…
  • Les travailleuses et travailleurs ont accès à l’eau potable, une trousse de sécurité, aux procédures en cas d’urgence. Une mise à disposition des informations propres à la santé et aux congés maladies est assurée. Des formations aux situations de travail dangereuses (terrain difficile, «équipement de sécurité individuel[13]…), et un examen médical sont pratiqués. Pour les personnes qui manipulent des produits dangereux comme les pesticides, l’examen médical est réalisé au moins une fois par an.
  • Conditions de vie et logement : les personnes qui logent sur le lieu de travail ont accès à des quartiers de vie sécurisés, propres et décents. Ceux-ci assurent une protection contre les intempéries, et un accès à l’eau potable, une cuisine ventilée, et répondent à diverses exigences sur le confort et l’hygiène notamment.
  • Communautés : respect des droits des peuples autochtones et des communautés locales.

L’environnement :

On fait mention ici de :

  • Forêts et autres écosystèmes : il est interdit d’utiliser de terres qui viendraient de conversions de forêts ou d’écosystèmes effectuées après le 1er janvier 2014[14]. Pas de production ou de transformation non plus dans des aires protégées ou leurs zones tampons.
  • Conservation et amélioration des écosystèmes naturels, avec le maintien du couvert de végétation naturelle visant minimum 10 à 15% de couverture et le maintien des zones ripariennes [15] tampon.
  • Protection de la faune sauvage et de la biodiversité. Pas de chasse d’animaux ou de cueillette de plantes menacés[16], pas d’introduction d’espèces envahissantes, réduction de l’érosion par l’eau ou le vent (végétalisation de zones en pente par ex.), pas d’utilisation du feu pour préparer ou nettoyer les champs (sauf si justifié), atténuation des conflits avec les animaux sauvages grâce à des barrières par exemple.
  • Conservation et gestion de l’eau par l’entretien de systèmes d’irrigation afin d’optimiser la production en minimisant les pertes en eau avec mesure de l’eau utilisée, et mesures de réduction de la consommation d’eau. L’eau de pluie est utilisée pour l’irrigation, bien qu’il s’agisse d’un critère facultatif.
  • Gestion des eaux usées prévoit l’analyse des eaux usées en conformité avec la législation locale ou les paramètres du référentiel Rainforest[17].  Les eaux venant des activités de transformation des produits de l’exploitation ou de l’activité humaine ne sont pas utilisées par défaut, sauf à respecter des paramètres de qualité.
  • Gestion des déchets interdisant l’incinération des déchets sauf si des incinérateurs sont spécifiquement prévus à cet effet. La gestion des déchets vise également l’absence des risques pour la sécurité ou la santé des hommes, animaux et écosystèmes naturels.
  • Efficacité énergétique prévoyant notamment la documentation des différentes énergies utilisées, des mesures de consommation, un plan de réduction des énergies non renouvelables, et de manière facultative la mesure des émissions de gaz à effet de serre en vue de les réduire.

Lien vers les critères / le référentiel en ligne  

Gestion du label

Rainforest est membre d’Iseal, comme MSC.

Contrôle indépendant ?

Oui. Voici la liste des organismes certificateurs agréés : https://www.rainforest-alliance.org/wp-content/uploads/2021/07/authorized-certification-bodies.pdf . (par ex. Ecocert, TÜV Nord Integra et beaucoup d’autres).

Site

https://www.rainforest-alliance.org/fr/

Catalogue des produits / entreprises labellisés

Il existe un moteur de recherche des marques qui proposent des produits labellisés Rainforest : https://www.rainforest-alliance.org/fr/find-certified/

Pour aller plus loin

 

 

 

 


[3] Le bilan massique est une certification comptable : on ne peut pas vendre plus de cacao (par exemple) certifié qu’on en produit. Cela permet du coup de vendre comme certifié un cacao qui ne l’est pas (puisqu’il est « couvert » par une production équivalente de cacao certifié). Un peu comme quand on achète de l’électricité verte. Celle que l’on consomme ne provient pas toujours d’une éolienne, mais l’électricité que l’on consomme est couverte par une production verte équivalente quelque part. Plus d’infos dans [LIEN article général]

[4] Jusqu’au dernier intermédiaire prévu par le certificat du producteur, pas jusque au supermarché au bas de notre rue.

[5] Bananes, fruits frais et cacao : https://www.rainforest-alliance.org/wp-content/uploads/2024/06/SA-S-SD-21-V1.2FR-Annexe-Chapitre-3-Revenu-et-responsabilite-partagee.pdf . On y lit par exemple que pour le cacao le différentiel de durabilité est de 63€/MT (tonne métrique) en juillet 2024. La prime Fairtrade est de 221€ par tonne métrique (fin 2023) : https://files.fairtrade.net/standards/2023-10-04_Cocoa_FMPdifferential_Announcement_FR.pdf 

[6] Extraits du référentiel : « le système de certification vise à permettre aux travailleurs agricoles et à leurs familles de parvenir à des conditions de vie décentes et de gagner un salaire minimum vital. » et (l’approche de Rainforest est) « d’apporter de la transparence sur les salaires en vigueur dans la production agricole, d’engager les titulaires de certificats dans une amélioration continue et dans le dialogue et d’encourager les entreprises à pratiquer la responsabilité partagée dans les chaînes d’approvisionnement afin de prévenir et d’atténuer les impacts négatifs au regard des salaires insuffisants. »

[8] Comme les exploitations peuvent être mixtes (avec une production certifiée à côté d’une production non certifiée), les OGM peuvent se trouver dans la même exploitation, mais pas sous forme certifiée. Un producteur de cacao pourrait donc avoir à la fois du cacao certifié et, à côté, des bananes OGM (exemple totalement fictif pour illustration uniquement).

[9] 184 substances (interdites et obsolètes) + diverses substances restreintes.

[10] Autrement dit, si un produit est exporté dans un pays « non prévu », il est possible qu’il y ait trop de pesticides sur l’aliment si les LMR du pays de destination sont inférieures à celles du pays de production.

[11] S’il est mis que « Le travail des enfants, le travail forcé, la discrimination et la violence et le harcèlement au travail ne sont pas tolérés dans les exploitations agricoles certifiées de Rainforest Alliance. », il n’y a pas d’interdiction dès le départ. Il est également précisé : « Les cas graves, s'ils ne sont pas résolus, et/ou les infractions de la législation applicable, mèneront à une décision de refus de certification, de suspension ou d’annulation du certificat ». Ce qui sous-entend que les cas non graves, s’ils doivent être résolus, ne mènent pas à une décertification s’ils ne le sont pas. Le système d’évaluation-résolution est évalué tous les ans.

[12] On n’a pas vu, dans le référentiel, de délai au-delà duquel ce salaire minimum vital est atteint. Le salaire vital est défini comme « le salaire perçu par un travailleur pour une semaine de travail standard dans une région donnée suffisant pour permettre une vie décente pour lui et sa famille. Les éléments d’une vie décente comprennent la nourriture, l’eau, le logement, l’éducation, les soins de santé, les transports, les vêtements et d’autres besoins comme l’épargne pour faire face à des imprévus. » https://www.globallivingwage.org/about/what-is-a-living-wage/ (Rainforest et Fairtrade font partie de Global Living Wage Coalition).

[13] EPI : masques, gants, casques…

[14] Avec quelques subtilités cependant. Convertir une forêt de plantation (non naturelle donc) en usage agricole n’est pas de la déforestation. Des conversions d’écosystèmes naturels (forêts ou non) restent autorisées mais limitées (à 1% de la surface de l’exploitation ou 10ha) et doivent faire l’objet de restaurations ou compensation etc. Plus d’infos dans l’annexe SA-S-SD-24.

[15] La végétation qui s’établit le long des cours d’eau, sur les berges.

[16] Selon les listes de l’UICN et CITES.

[17] Défini dans le glossaire (cf. liens en fin de fiche).

Dernière mise à jour
02 septembre 2024
Rédigé par
Renaud De Bruyn

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