Le bois a la cote…

Poutres, madriers, chevrons de structure, bardages, panneaux, châssis, escaliers, planchers, terrasses, cabanons, bardeaux, clôtures, modules extérieurs pour enfants… Les usages du bois dans la construction, reprennent sans conteste du terrain. Le succès récurrent du salon Bois et Habitat à Namur en témoigne. Les utilisations modernes du bois dans les bâtiments rencontrent les préoccupations actuelles de confort, d'économies d'énergie et, plus globalement, de durabilité de la mise en œuvre.

Mais la question du traitement du bois pour assurer sa pérennité demeure. Toxique, pas toxique ?

Aujourd'hui, il est possible d'envisager l'utilisation du bois dans la construction et les aménagements intérieurs sans traitement sous certaines conditions. Ce dossier vise à informer sur ces possibilités ainsi que les enjeux et les conditions de cette option.

Plein de qualités mais parfois sensible…

Nous choisissons le bois pour toutes ces qualités : travail facile et agréable, chaud au toucher et à la vue, parfois disponible localement, immobilisation du carbone dans le bois (fixateur de C02), sans compter ses multiples qualités techniques et esthétiques.

Le bois et les dérivés du bois sont des matériaux organiques d'origine végétale. A ce titre, ils peuvent être endommagés voire détruits par des insectes, des champignons et moisissures ainsi que par le feu.

Ces risques dépendent de plusieurs facteurs : l'exposition du bois à l'humidité, la durabilité naturelle de l'essence (l'espèce de l'arbre), la présence de fissures, la qualité du façonnage, le traitement et/ou le recouvrement éventuels, la qualité de la mise en œuvre, etc. Nous y reviendrons.

Nous voilà donc avec du bois à mettre en œuvre, à soigner, à entretenir… mais comment ?

Petit détour par les traitements chimiques du bois

Il existe une panoplie de produits de traitement chimique du bois :

  • des produits à base d'eau en vue d'un traitement préventif contre les insectes et champignons : sels minéraux hydrosolubles à base de bore, de chrome, de fluor, de cuivre, d'ammonium quaternaire ;
  • des fongicides et insecticides préventifs dissous dans des solvants organiques : dichofluanide, deltaméthrine, perméthrine, propiconazole, etc ;
  • des produits variés de traitement curatif du bois.

Certaines de ces molécules actives ont été interdites d'utilisation étant donné leur nocivité avérée, notamment le PCP (Pentachlorophénol), le lindane, les produits à base d'arsenic et de mercure.

L'emploi de ces produits de traitement préventif, insecticides et fongicides pose une série de risques potentiels de pollutions de l'environnement lors de la production, en cas d'incendie ou comme polluant de l'air intérieur de nos maisons, lors de l'utilisation ou, plus insidieusement, sur la durée.

Autant dire qu'il est toujours intéressant de se demander si une solution alternative existe aux traitements chimiques du bois. Sous certaines conditions, elles existent…regardons cela de plus près !

Choisir un bois adapté à son usage

Les classes de risques

Pour évaluer les risques de dégradation et les traitements éventuellement nécessaires qui en découlent, on a établi 5 classes de risques qui sont fonction de l'usage du bois.

Classe de risque

Conditions d'exposition

Exposition à
humidification

Distribution des agents biologiques

Mesures de protection

Type de protection

Champi-gnons

Insectes

Termites

Org. Marins

1

Bois d'intérieur en milieu sec. Fonctions de revêtement et de finition.

Aucune

-

Présents

Loc. présents

-

Traitement facultatif en évaluant si le prix est supérieur à celui d'une réparation ou d'un traitement curatif.

Superficielle.
Profondeur
de 1 à 3 mm

2

Bois à fonction structurale en milieu fermé ; Bois avec risque d'humidification.

Occas.

Présents

Présents

Loc. présents

-

Traitement préventif recommandé, en particulier en cas de réparations difficiles et coûteuses.

Profondeur
entre
1 et 3 m.

3

Bois soumis à des périodes d'humidité et de sécheresse, sans contact avec le terrain.

Fréquente

Présents

Présents

Loc. présents

-

Traitement préventif recommandé, en particulier en cas de réparations difficiles et coûteuses.

Superficielle,
minimum
3 mm
de profondeur
65% l'aubier

4

Bois au contact permanent d'une source d'humidité. Humidité du bois >20%. Bois d'intérieur ou d'extérieur.

Permanente

Présents

Présents

Loc. présents

-

Traitement préventif et procédures de construction appropriées.

Profondeur
moyenne
3-6 mm.
100% l'aubier

5

Bois au contact permanent de l'eau salée. L'humidité du bois est toujours > à 20%. Partie immergée attaquée par les invertébrés marins, partie aérienne en risque classe 4

Permanente

Présents

Présents

Loc. présents

Présents

Traitement préventif aux sels hydrosolubles, outre aux procédures de construction appropriées.

Profondeur
minimum
6 mm
100% l'aubier

Source : www.isve.com (Traitement du bois et broyage des déchets).

Durabilité naturelle des essences

Conscient des risques posés par l'utilisation de certaines essences de bois dans une situation donnée, on peut alors choisir une essence de bois préférentielle qui permettra éventuellement de se passer d'un traitement chimique.

En regardant le tableau d'un peu plus près, on peut voir que, pour les essences de feuillus en milieu tempéré et pour la classe 3, le noyer, le châtaigner, le chêne rouvre pédonculé et le robinier sont indiqués. Pour la classe 4, seul le châtaignier, le chêne rouvre pédonculé et le robinier sont indiqués.

Pour les essences résineuses en milieu tempéré, pour la classe 3, le cèdre, le douglas, le mélèze, le pin maritime et le pin sylvestre sont indiqués.

Feuillus et résineux

1

2

3*

4*

Douglas

oui

oui

oui

non

Mélèze

oui

oui

oui

non

Pin sylvestre

oui

oui

non

non

Sapin, Épicéa

non

non

non

non

Red cedar

oui

oui oui non
Châtaignier

oui

oui oui non
Chêne

oui

oui

oui

non
Hêtre

non

non non non
Robinier

oui

oui oui oui
Ayous

non

non non non
Doussié

oui

oui oui oui
Iroko

oui

oui oui oui
Sipo

oui

oui oui non
Teck d'Asie

oui

oui oui oui

Durabilité naturelle des essences permettant d'utiliser le bois
avec ou sans traitement dans les classes de risques
Source : www.crit.archi.fr (Centre de Ressources et d'Informations
techniques de l'Ecole d'Architecture de Nancy).

La protection « constructive » du bois

Une fois l'essence de bois choisie, les principes de la protection « constructive » du bois se basent sur la qualité de sa mise en œuvre afin de se passer complètement de produits de traitements préventifs.

Il faut pour cela savoir que le bois mis en œuvre ne sera endommagé que sous certaines conditions :

  • une humidité du bois de min. 18% pour être attaqué par des champignons et des moisissures ;
  • un séchage retardé par une couche imperméable (une laque par exemple) ;
  • des fissures permettant le développement des spores des champignons ou le dépôt des œufs des insectes ;
  • une humidité constamment supérieure à 10% pour le développement des insectes xylophages (qui mangent le bois).

Si l'on arrive à éviter ces conditions favorables à la dégradation biologique du bois, on pourra réduire le recours à l'utilisation de produits de traitements. Comment ?

Les principes de la protection « constructive » du bois

  • Choisir une essence de bois suffisamment résistante naturellement ;
  • Privilégier un abattage d'hiver dit « à sève descendante » ;
  • Eviter les fissures dans le bois (façonnage, sélection et séchage de qualité) ;
  • Mettre en œuvre du bois dont l'humidité est inférieure à 19% ;
  • Eviter de recouvrir le bois d'un film ou d'une peinture imperméable pour le garder ouvert à la diffusion ;
  • Eviter l'utilisation du bois dans des situations critiques (classe de risque 5) ;
  • Travailler sur un chantier sec à l'abri des intempéries.

Concrètement, l'humidité peut être contrôlée avec un petit appareil de mesure, l'humidimètre pour bois, d'ailleurs bien utile aussi lors de l'achat de bois de chauffage (voir image ci-contre).

La protection du bois aux intempéries à plus long terme peut être obtenue techniquement lors de la conception et la mise en œuvre. Par exemple :

Pour la maison :

  • veiller dans la mesure du possible à des débords de toitures suffisant, surtout du côté battu par la pluie ;
  • veiller à ne pas avoir de contact direct du bois avec la terre, pour le bas d'un bardage par exemple ou les madriers de support d'une terrasse en bois.

Pour un bardage :

  • veiller à ce que les gouttes ruisselantes ne puissent pas stagner dans les jonctions entre les planches (vérifier le profil) ;
  • permettre une bonne ventilation derrière le bardage, par un double lattage par exemple et une «sortie d'air» en haut et en bas ;
  • éviter de poser le bardage à moins de 30 cm du sol pour les éclaboussures en cas de fortes pluies.

Pour les châssis :

  • veiller à ce que les appuis de fenêtre soient munis d'une rainure inférieure d'évacuation des gouttes;
  • veiller à ce que les profils d'évacuation de l'eau dans le dormant (la partie de la fenêtre qui ne s'ouvre pas) ne soient pas bouchés.

Pour une terrasse en bois :

  • déconnecter le bois de la terre par des pieds en métal par exemple ;
  • veiller à la bonne ventilation naturelle du dessous de la terrasse.

Les traitements « alternatifs » du bois

Si malgré ce qui précède, un traitement était malgré tout nécessaire au vu des conditions d'utilisation du bois, il existe aujourd'hui sur le marché des techniques alternatives de traitement du bois qui visent à limiter l'impact sur la santé et l'environnement.

Parmi elles :

Les traitements « industriels » préventifs du bois, dont, par exemple :

  • Le bois rétifié. Un traitement thermique (chauffage à 180°C) modifie les propriétés physiques et chimiques du bois : augmentation de la résistance aux insectes, champignons et moisissures, meilleure stabilité dimensionnelle, augmentation de 10% de la valeur isolante du bois ;
  • L'oléothermie. Le bois est immergé dans un mélange d'huiles d'origines végétales chauffé à des températures comprises entre 60 et 150°C, pour obtenir des avantages similaires à ceux du bois rétifié.

Les produits de traitement « domestique » du bois, comme les produits de traitement « écologiques » du bois. On pourra pour cela s'orienter de préférence vers des produits labellisés (Naturplus, NF Environnement, Ecolabel européen, …). On évitera les produits mentionnant des pictogrammes de danger de toxicité.

En conclusion, il s'avère que dans bien des cas on a recours à un traitement préventif du bois alors que les conditions nécessaires à sa dégradation ne sont pas réunies. On aurait donc pu éviter une dépense inutile ainsi qu'un impact potentiel négatif sur l'environnement et la santé.

En espérant vous avoir donné envie d'utiliser le bois pour ce qu'il est : un matériau sain, naturels et écologiques.

Réagissez à cet article !

Sources et pour en savoir plus :

Littérature :

  • Peter GELDORF e.a., Duurzaam zonder verduurzaming, Over duurzam houtgebruik zonder preventieve chemische behandeling, VIBE, 2005 (NL).
  • Peter WEISENFELD & Holger KÖNIG, Holzschutz ohne Gift, Holzschutz und Oberflächenbehandlung in der Praxis, Ökobuch, 2008 (D).
  • Territoires et Bois, 12. Le bois en revêtements extérieur et son entretien, Service Public de Wallonie & Valbois, 2009.

Sur le Web :

Dernière mise à jour
18 mars 2010
Mots-clés
Rédigé par
Jean-François Rixen

Nos projets en cours