Des avantages écologiques exagérés, une label inventé, un emballage trompeur… Voici comment repérer le greenwashing et éviter ses pièges.
Des textiles qui nettoient les océans, des compagnies pétrolières qui visent la neutralité carbone, des voitures qui purifient l’air, des baskets qui mettent fin aux déchets plastiques, des objets qui sauvent la planète… On a envie d’y croire non ?
On parle de greenwashing lorsqu’une organisation utilise dans sa communication des arguments écologiques qui sont disproportionnés, vagues, partiels ou trompeurs par rapport aux actions réellement entreprises par cette organisation pour diminuer son impact environnemental. Voici plusieurs techniques de greenwashing, qu’on peut repérer pour éviter les pièges.
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Le message donne l’impression que consommer un produit va avoir un bénéfice énorme sur l’environnement alors que, tout au plus, on peut espérer avoir un impact plus faible qu’avec un autre produit.
Même s’il est possible que la concentration en certains éléments (notamment les oxydes d’azote) soit plus faible en sortie de filtre que dans l’air ambiant, il est abusif d’affirmer que conduire un tel véhicule aboutirait à améliorer la qualité de l’air, voire carrément à le rendre pur.
Bel exemple : SPA a sorti un emballage en carton et en plastique souple de 5 litres pour l’eau et l’a nommé « Eco Pack » avec le slogan « Pratique et écologique ». Sur l’emballage lui-même, un QR code invite le consommateur à découvrir comment SPA prend soin de notre planète.
Dans une campagne d’affichage, il n’était pas précisé qu’il y avait 65% de plastique en moins que dans les packs de bouteilles de 6 x 1 litre et 6 x 1,5 litres de cette eau. Dans ce cas, le Jury d'Ethique Publicitaire a épinglé le manque de précision sur l’affiche mais n’a pas relevé le terme ECO sur fond vert accompagné la mention « écologique ».
Autrement dit, on peut saluer d’un côté les efforts de l’entreprise sans pour autant imaginer que la consommation de leurs produits devient carrément « positive pour la planète ».
Dans ces deux exemples, la formulation « prendre soin de la planète » est exagérée même si les deux entreprises détaillent par ailleurs les démarches et les efforts entrepris pour diminuer leurs impacts (réduction des emballages plastiques, certification B-Corp, bilan carbone…).
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Parfois il n’est nul besoin de texte pour suggérer une idée de durabilité au consommateur.
Lufthansa a développé une série de visuels mi-avion mi-nature pour communiquer autour de sa stratégie de durabilité. On peut y voir une espèce de symbiose entre l’homme et la nature qui est trompeuse, l’impact de l’aviation sur le climat étant loin d’être négligeable.
Une plainte a été déposée auprès du Jury d’Ethique Publicitaire qui a estimé que la campagne d’affichage liée contrevenait au Code de la publicité écologique (décision du 4 juillet 2022).
La stratégie de l’entreprise (comme c’est souvent le cas pour les compagnies aériennes) est de miser sur un carburant « vert » et la compensation carbone.
Un label garantit le respect d’un cahier des charges comprenant des critères bien établis, consultables en toute transparence et vérifiés par un organisme tiers. Les entreprises peuvent créer leurs propres labels mais cela entraîne une confusion (prolifération de labels), tend à induire le consommateur en erreur et est rarement garant de transparence.
Exemple de label introduit par une entreprise active dans les machines à café pour leurs appareils qui garantissent un plaisir de « dégustation et éthique ».
Une entreprise emploie du plastique recyclé dans certains de ses produits. Non seulement la proportion de plastique n’est pas précisée (ce n’est en réalité qu’une partie du produit qui contient du plastique recyclé) mais l’utilisation d’un logo maison « End plastic waste – Mettre fin aux déchets plastiques » est trompeuse car ce n’est certainement pas une solution pour mettre fin aux déchets plastiques, la promesse est démesurée.
Le petit logo « 100% neutre en carbone » prête à confusion, même si une phrase en petit précise qu’il s’agit d’une compensation carbone de la flotte. Cette publicité a été épinglée par le Jury d’Éthique Publicitaire (décision du 23 décembre 2020).
Lorsque l’on met en avant un effort apporté à une partie non significative de l’impact de son activité, on détourne l’attention par rapport aux vrais enjeux.
Cette banque communique sur une carte non colorée (économie d’encre) et constituée de plastique recyclé. Or, le principal impact des banques est leur capacité de financement de projets nocifs pour le climat, en particulier ceux exploitant des énergies fossiles.
Dans l’absolu, avoir quelques millions de cartes en plastique qui ont un impact réduit c’est pas mal mais ce n’est pas du tout là qu’est l’enjeu, à la fois en matière de réduction de l’utilisation de plastiques de manière globale et, surtout, en matière d’impact des banques.
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En magasin, un visuel attire l’œil avec les indications « Nouvelle bouteille circulaire. 100% créée à partir d’anciennes bouteilles et 100% recyclable ». Le visuel montre une bouteille posée sur de la mousse comme si la nature reprenait ses droits. Sur le site, on retrouve cette impression de forêt intacte, comme si la consommation de bouteilles d’eau était transparente, zéro impact.
Si on peut apprécier l’effort de fabriquer des bouteilles composées à 100% de PET (plastique) recyclé, les visuels donnent une impression de communion avec la nature, comme si les impacts avaient disparu comme par magie.
Sur le site on voit également que l’entreprise parle de bioplastique, utilisé à la place du pétrole. Là non plus pas de magie : ce plastique PET aura les même propriétés que le PET issu de la pétrochimie et restera un emballage jetable là où les emballages réutilisables sont bien meilleurs pour l’environnement.
Parfois un produit met en avant une caractéristique comme s’il s’agissait d’un argument écologique alors qu’il respecte simplement la loi. C’est par exemple le cas de produits cosmétiques portant la mention « non testé sur des animaux » alors que cette pratique est interdite chez nous depuis… 2013.
Cette pratique n’est pas tout à fait du greenwashing, il s’agit plutôt d’une pratique contraire à la déontologie. Par exemple, la représentation d’un véhicule tout terrain dans ce qui semble être une forêt ancienne pour montrer qu’il est « à l’aise sur tous les terrains » est contraire au code déontologique du secteur.
Dans cette pub vidéo, un SUV est utilisé pour récolter les déchets plastiques sur la plage et sauver les bébés tortues. Un véhicule n’a évidemment pas sa place sur la plage et, surtout, le message est complètement hors sujet.
Ces deux pratiques ont des approches inverses mais font un parallèle entre des gestes écologiques et un produit dans le but d’y associer une image verte.
En (1) un exemple de surenchère verte : le terme « ECO », la couleur verte, les petites fleurs, le parfum 100% biodégradable et même le mot clé #respectueux de l’environnement sur le site sonnent creux car ils ne s’appuient pas sur des informations étayées.
En (2) on voit que le produit est porteur de l’écolabel européen, ce qui est signe de respect de critères écologiques bien définis et vérifiés, le terme ECO peut se justifier.
L’emballage du produit ci-dessus est un bel exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Outre la couleur verte dominante, on trouve une longue liste d’allégations environnementales : « 99% d’origine naturelle, « fête des fleurs », « avec huiles essentielles », « fraîcheur naturelle ». Ça se poursuit à l’arrière : des logos pour illustrer les allégations « bouteille et bouchon recyclables », « bouteille 100% plastique recyclé », « produit éco-responsable », « sans micro-plastiques », « parfum avec extraits naturels », « Save water » et le logo Clean Right[1].
Pas moyen d’obtenir davantage d’informations malheureusement, le site indiqué étant celui d’une multinationale qui regroupe de nombreuses marques et où l’on ne trouve pas les informations spécifiques à cette marque (Ajax).
Cette publicité pour le gaz a tout du greenwashing : la couleur, le « naturellement », le « Energie positive ». Le gaz naturel est avant tout un combustible fossile et le biogaz obtenu par biométhanisation (qui lui pourrait être qualifié de « vert ») ne représente qu’une petite fraction du gaz utilisé.
[1] Clean Right est une initiative de l'Association Internationale de la Savonnerie, de la Détergence et des Produits d'Entretien pour informer le consommateur.
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