Fourmis, moustiques, puces et autres bestioles… On a vite recours aux insecticides, même dans sa maison. Est-ce un danger ? Décryptage et conseils.
À l’aide, il y a des petites bêtes dans la maison ! Il est tentant de dégainer l’insecticide : quelques coups de spray peuvent venir à bout d’une colonie d’insectes installée chez soi. C’est la solution de facilité par excellence.
Mais cette efficacité et cette facilité vont de pair avec des effets négatifs pour l’environnement et la santé. On utilise trop d’insecticides, trop souvent et souvent mal. Et on introduit même des pesticides chez soi sans vraiment s’en rendre compte. Ce sont pourtant des produits chimiques qui peuvent contenir des substances problématiques.
Attention danger ? On se penche sur leur étiquette et sur les risques liés à leur utilisation.
Sommaire :
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Connaissez-vous les biocides ? C’est ainsi que l’on appelle les produits pesticides utilisés à l’intérieur de la maison. Leur but : tuer, repousser ou rendre inoffensifs les « nuisibles ». Ils comprennent les insecticides (contre les insectes volants, rampants, etc.) mais aussi les désinfectants par exemple.
Les pesticides utilisés à l'intérieur de la maison sont appelés les "biocides". Parmi les biocides, on trouve, entre autre, les insecticides.
Et si on tolérait quelques insectes ? Et si on optait pour des méthodes naturelles et un peu de prévention ? Dans la majorité des cas, on pourrait se passer de pesticides.
« Des pesticides et insecticides dans ma maison, jamais de la vie ! ». Vraiment ? Près de 75 % des ménages utilisent ce type de produits chaque année[1].
Connait-on les insecticides qu’on utilise chez soi, souvent sans y penser ?
Ça en fait un paquet, pas vrai ? Et tout cela s’ajoute :
On ne peut pas tout contrôler mais pour protéger sa santé et l’environnement, on peut tout de même limiter les substances dangereuses que l’on introduit dans sa maison.
Même s’ils sont appliqués en intérieur, les biocides peuvent facilement se retrouver dans l’environnement (dans l’eau, l’air, les sols), par exemple via les eaux usées, suite à une mauvaise gestion des déchets, dépendant de l’endroit où l’on les applique… Ils occasionnent alors des impacts négatifs sur la biodiversité[2].
Par exemple, si un chien ou un chat muni d’un collier antipuces va se baigner dans une rivière, de nombreuses substances du collier vont se retrouver dans l’eau et au final dans l’environnement.
Certains biocides sont interdits dans l’agriculture et pourtant autorisés dans nos environnements intérieurs, un comble ! Certains sont toxiques pour les pollinisateurs et diverses populations d’insectes, d’autres pour les organismes et plantes aquatiques… Les conséquences de ces substances sont sans appel sur la biodiversité : perturbation de la reproduction, désorientation, mortalité…
> Voir aussi : 8 idées toutes simples pour favoriser la biodiversité au jardin
Plus ces pesticides sont utilisés, plus certains insectes y deviennent résistants (d’autant plus si les règles d’utilisation ne sont pas respectées).
On observe par exemple que plusieurs espèces d’insectes telles que les cafards, les moustiques, les punaises de lit ou les poux deviennent plus résistants aux pyréthrinoïdes, le type d’insecticide le plus utilisé en Europe[3]. Le même phénomène est observé avec le Fipronil et les puces de lits.
La résistance est souvent synonyme de cercle vicieux, car cela signifie qu’il faudra utiliser plus de produits, des produits plus concentrés ou rechercher encore d’autres insecticides pouvant avoir le même effet.
En plus des accidents occasionnels, les biocides font partie des polluants de l’air intérieur.
> Voir aussi : Santé : comment identifier les polluants de l’air dans la maison ?
Mais qu’ont-ils comme effets, quel danger représentent-ils pour la santé ?
Mal utilisés, les insecticides peuvent causer de nombreux problèmes pour la santé : intoxication, brûlures, irritations, problèmes respiratoires, allergies…
Un quart des personnes qui utilisent des biocides ne respectent pas les conditions d’usage, d’après l’ANSES. Certains plaident d’ailleurs pour une réglementation plus stricte en ne les laissant plus en vente libre[4]. Affaire à suivre !
Même s’ils ne sont pas en contact avec notre peau, ces pesticides peuvent se retrouver dans l’air et les poussières que l’on respire. Des analyses de cheveux humains[5] ont révélé des expositions chroniques, avec notamment des traces de fipronil, de permetrhine, de DEET…
Certains biocides sont des perturbateurs endocriniens. Même à petite dose, ils peuvent avoir des effets sur la santé. Il peut aussi y avoir un « effet cocktail », où la combinaison de différentes substances peut avoir lieu et engendrer des conséquences néfastes pour la santé. D’autres pesticides sont reconnus comme étant toxiques pour la reproduction ou neurotoxiques.
> Voir aussi « Liste des perturbateurs endocriniens : où les trouver et quels effets ? »
Est-ce qu’ils représentent un risque pour la santé ? Pas forcément, cela va dépendre de plusieurs choses :
Dans le doute, il est sage d’appliquer le principe de précaution. Comme on ne sait pas exactement quels effets peuvent en découler, autant utiliser les biocides le moins possible. D’autant que les alternatives écologiques sont souvent suffisantes.
> Lire : Se débarrasser des insectes dans la maison naturellement
Pour tuer la bestiole, sa larve ou son œuf, le biocide utilise une substance active. Certaines proviennent de sources naturelles mais ne sont pas sans risque pour autant. On se méfie donc des mentions qui flirtent avec le greenwashing pour faire croire à la personne qui achète un insecticide qu’il est sans danger.
Voici différentes substances actives que l’on peut retrouver sur les étiquettes ainsi que leurs effets potentiels.
Les données sur les pesticides proviennent de la Pesticide Properties Database. 4 niveaux d’alerte sont proposés pour les pesticides : élevée, modérée, possible ou négative (pas d’alerte).
Famille de la substance active |
Nom sur l’étiquette |
Effet sur la santé |
Effet sur l’environnement |
Pyréthrines ou pyréthrinoïdes (formes de pyréthrine synthétique) |
Extrait de chrysanthème, perméthrine[6]**, transfluthrine[7], pralléthrine[8], tétraméthrine[9], cyperméthrine[10]**, deltaméthrine[11], |
Alerte élevée
Irritantes et allergisantes. Effets potentiels |
Alerte élevée
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Imidaclopride**, dinotéfurane… |
Alerte élevée
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Alerte élevée
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N-diéthyl-3-méthylbenzamide Diethyltoluamide** |
Alerte élevée
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Toxicité modérée pour les espèces aquatiques. |
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Diazinon (ou dimpylate) |
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Alerte élevée
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Alerte élevée
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Pas d’effets démontrés. |
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Phénylpyrazolés |
Fipronil*,** |
Alerte élevée
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Alerte élevée
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Pyridines |
Pyriproxifène** |
Alerte modérée Effet potentiel : perturbateur endocrinien. |
Alerte élevée |
* Substances interdites dans l’agriculture
** Produits biocides retrouvés dans les environnements intérieurs lors du projet « Transparence » en Wallonie[30].
Toutes ces substances sont toutefois régulées par l’Union européenne et des doses maximales sont définies et contrôlées. Mais de nouvelles substances sont régulièrement utilisées dans les produits biocides et il faut toujours de nombreuses années pour que la législation s’adapte… Heureusement, les substances les plus dangereuses, utilisées il y a encore quelques années, sont désormais interdites partout en Europe (par exemple les Dichlorvos, Chlorpyrifos, Propoxur, Lindane, naphtaline…).
D’autres substances sont autorisées en circuit « fermé », c’est-à-dire qu’elles ne sont pas en libre accès pour les particuliers et ne peuvent être utilisées qu’avec des précautions particulières par les professionnels. De plus, un plan fédéral belge de réduction des biocides est désormais mis en place depuis fin 2023 afin de sensibiliser les consommateurs et consommatrices, diminuer la quantité de biocides et les risques associés, lutter contre la résistance microbienne...
Les biocides ne sont pas à utiliser à la légère vu leurs effets sur l’environnement et la santé. Pour éviter l’invasion de petites bêtes ou les chasser, on peut se tourner vers des alternatives efficaces et naturelles[31].
Il s’agit de la première étape. Plus on anticipe le problème ou on le prend tôt, plus il est facile de le résoudre sans produits nocifs. Il y a des diverses astuces : mettre la nourriture dans des bocaux hermétiques, utiliser des répulsifs naturels, installer une moustiquaire…
> Voir les bons gestes de prévention.
Les petites bêtes sont en train de proliférer et on cherche désespérément à s’en débarrasser ? Heureusement il existe de plus en plus d’alternatives naturelles, respectueuses de l’environnement et de la santé : des produits labellisés, des techniques mécaniques…
> Lire : Se débarrasser des insectes dans la maison naturellement
Et les petites bêtes au potager ? Là aussi il y de nombreuses solutions pour éviter les pesticides au jardin et au potager.
Si on décide malgré tout d’utiliser un insecticide ou un autre pesticide dans la maison, on respecte scrupuleusement les précautions d’emploi pour minimiser les risques pour la santé et pour la biodiversité. Voici quelques consignes de sécurité :
> Voir aussi : À quoi il faut faire attention quand on utilise des pesticides ?
Et petit rappel, on n’utilise des pesticides qu’en dernier recours !
[1] « Etude Pesti’home : enquête nationale sur les utilisations domestiques des pesticides » ANSES (2019)
[2] « Tuer le vivant indésirable : penser la circulation des biocides dans les espaces quotidiens et urbains pour mieux penser les politiques publiques » Gobert J. et al (2023)
[3] “The study on biocidal resistance of mosquitoes of genus Culex and Aedes to commonly used biocides cypermethrin and deltamethrin in Central Europe” Iľko, I., Peterková, V., Heregová, M., Strelková, L., Preinerová, K., Derka, T., ... & Čabanová, V. (2023).
[4] “Produits biocides : proposition de critères pour la restriction de leur vente en libre-service » Anses (2022)
[5] « Biomonitoring of pesticides in hair: How veterinary drugs contaminate human hair » PAN Europe (2021)
[6] “Permerthrine” PPDB
[7] “Transfluthrin” PPDB
[8] “Prallethrin” PPDB
[9] “Tetramethrin” PPDB
[10] “Cypermethrin” PPDB
[11] “Deltamethrin” PPDB
[12] “Cyfluthrin” PPBD
[13] « Exposure to pyrethroid pesticides and ovarian reserve.” Jurewicz J, Radwan P, Wielgomas B, Radwan M, Karwacka A, Kałużny P, et al. (2020)
[14] “Semen quality and the level of reproductive hormones after environmental exposure to pyrethroids.” Radwan M, Jurewicz J, Wielgomas B, Sobala W, Piskunowicz M, Radwan P, et al. (2014)
[15] “Environmental pyrethroid exposure and diabetes in U.S. adults” Park J. (2019)
[16] "Behavioural disorders in 6-year-old children and pyrethroid insecticide exposure: the PELAGIE mother-child cohort” Viel J-F, Rouget F, Warembourg C, Monfort C, Limon G, Cordier S, et al. (2017)
[17] « Retrospective Evaluation of Factors Associated with the Morbidity and Outcome of Permethrin Toxicosis in Cats” Kelmer, E., Oved, S., Abu Ahmad, W., Chai, O., Aroch, I., & Klainbart, S. (2020).
[18] “Biomarkers of pyrethroid toxicity in fish” Ullah, S., Li, Z., Zuberi, A., Arifeen, M. Z. U., & Baig, M. M. F. A. (2019)
[19] « L’impact sur la santé humaine des substances néonicotinoïdes autorisées dans les produits phytopharmaceutiques et les produits biocides » selon l’avis de l’ANSES 2017
[20] « Imidacloprid » PPDB
[21] « midacloprid (ISO) » fiche toxicologique de l’ECHA
[22] « dinotefuran (ISO); 1-methyl-2-nitro-3-(tetrahydro-3-furylmethyl)guanidine” fiche toxicologique de l’ECHA
[23] « N,N-Diéthyl-m-toluamide (DEET) » fiche toxicologique de l’ECHA
[24] « Diethyltoluamide » PPDB
[26] « Bioinsecticide spinosad poses multiple harmful effects on foragers of Apis mellifera.” Araújo, R. D. S. et al. (2023)
[27] “Insights into the toxicity and biodegradation of fipronil in contaminated environment” Bhatt, P., Gangola, S., Ramola, S., Bilal, M., Bhatt, K., Huang, Y., ... & Chen, S. (2023)
[28] “Insights into the toxicity and biodegradation of fipronil in contaminated environment” Bhatt, P., Gangola, S., Ramola, S., Bilal, M., Bhatt, K., Huang, Y., ... & Chen, S. (2023)
[29] « Comparison of the Sensitivity of Tetragonisca angustula (Apidae‐Meliponini) and Apis mellifera (Apidae‐Apini) to Three Insecticides (Malathion, Imidacloprid, and Fipronil) Used in Costa Rica.” Mena, F., Berrocal, S., Solano, K., Herrera, E., Gallardo, M., Jiménez, K., ... & Pinnock‐Branford, M. (2023).
[30] Projet « transparence » : d’où viennent les pesticides retrouvés dans les maisons ?, réalisé par Canopea.
[31] « Alternatives aux biocides » SPF santé Publique (2021)
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