Comment générer moins de déchets quand son habitat évolue ?

Une maison bien construite et entretenue peut durer d’une à plusieurs centaines d’années. Mais pendant ce temps, la vie des habitants aura beaucoup changé. Et souvent la maison aura connu plusieurs propriétaires ou locataires.

Les besoins changent et le logement ne s’adapte pas toujours facilement. On se retrouve donc à faire des travaux assez lourds : on casse, on ouvre, on remplace. Et on jette. Des matériaux parfois en très bon état se retrouvent ainsi dans un conteneur à évacuer à la fin du chantier.

Et si on pensait sa construction ou sa rénovation autrement ? Voici 5 idées pour mettre plus d’économie circulaire dans son projet :

  1. Concevoir un habitat qui pourra facilement évoluer
  2. Réutiliser les matériaux sur place quand on rénove
  3. Acheter des matériaux de récupération
  4. Bien gérer les déchets du chantier
  5. Valoriser les chutes et les restes de matériaux

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Le secteur de la construction, comme d’autres, évolue progressivement vers l’économie circulaire. Son fonctionnement plus durable devrait remplacer une vision trop linéaire et dépassée : on utilise des matières premières, on les transforme en produits, qu’on utilise puis qu’on jette. Ici c’est plutôt : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ! ». Explications :



Vidéo de la Fondation Nicolas Hulot

L’économie circulaire favorise donc la réparation, la réutilisation des produits et le recyclage des matériaux pour réduire les déchets et préserver les ressources. Mais la construction est aussi un exemple qui montre qu’il est indispensable de bien réfléchir la conception de son projet afin que son logement puisse avoir une durée de vie la plus longue possible tout en répondant à nos besoins.

Alors que peut-on mettre en place pour rendre son projet de construction plus durable et circulaire ?
 

1. Concevoir un habitat qui pourra facilement évoluer

La maison ou l’appartement que l’on achète correspond souvent à sa situation familiale du moment. Et si un logement pouvait évoluer au gré de la vie de ses occupants ? Et s’il s’adaptait facilement au fait de vivre seul, en couple, avec une famille ou quand on vieillit ?

C’est l’ambition du logement évolutif. Le concept ? Une maison modulaire, des cloisons que l’on peut déplacer, des espaces à scinder ou à recomposer pour qu’on puisse vivre toute sa vie dans son habitation sans devoir déménager.

Certains systèmes constructifs sont par exemple conçus de façon à ce qu’aucun mur intérieur ne soit porteur, ce qui permet de déplacer facilement une cloison intérieure.

Maison modulaire et évolutive

Le système constructif CIMEDE est une innovation belge par l'Atelier de l'Avenir.
Cette maison modulaire est conçue autour d'éléments en ossature bois préfabriques qui peuvent s'assemble, être ajoutés ou retirés en fonction des besoins des habitants. Il n’y pas de mur porteur à l’intérieur et les cloisons sont facilement modifiables par un non professionnel.
Photo : Projet à Saint-Georges (Architecte : Anthony SEUTIN - Urban Architectes / Ingénierie : principe constructif CIMEDE - Atelier de l’Avenir)

 

Que ce soit une construction ou une rénovation, on imagine l’avenir et on anticipe de futures évolutions. Par exemple :

  • placer d’avance des arrivées d’eau ou d’électricité dans les combles pour les aménager le moment venu ;
  • penser qu’un grand salon pourrait être divisé pour accueillir une nouvelle chambre ou un bureau ;
  • envisager qu’un dressing puisse devenir une deuxième salle de bain le jour où cela sera utile ;
  • préférer des mises en œuvres démontables et facilement accessibles (visser plutôt que coller par ex.) afin de faciliter les réparations et modifications ;
  • prévoir des fondations assez solides pour accueillir un jour un nouvel étage (pour agrandir la famille, accueillir un parent en perte d’autonomie, le mettre en location pour en tirer des revenus supplémentaires…) ;
  • etc.

En imaginant ces scénarios d’avance, on profite du chantier pour prévoir certains aménagements futurs tant qu’on est dans les travaux. Cela évitera de devoir rouvrir un mur récent pour allonger une canalisation, tirer un nouveau circuit électrique…

Du coup, qui dit logement évolutif, dit logement qui dure dans le temps… et plus économe. Déménager à un coût et modifier son habitation aussi. Dans une maison modulaire, les agrandissements sont programmés et les coûts maîtrisés. On évite de tout casser pour tout changer. C’est la base de l’économie circulaire : réduire les déchets et les gaspillages dès le départ. Et ça c’est tout bénéfice pour le portefeuille et l’environnement !

> Lire aussi : Comment concevoir une maison qui s'adapte aux évolutions de la vie ?
 

2. Réutiliser les matériaux sur place quand on rénove

Un plancher peut durer 100 ans, des carrelages 50 ans, des châssis et portes extérieures en bois une trentaine d’années, une chaudière 15 à 20 ans…[1] On modifie son logement pour le rénover ou le mettre à son goût mais ce n’est pas pour autant que tous ces matériaux sont en fin de vie. On peut les réutiliser. Tout ce qu’on ne doit pas acheter c’est autant d’économisé sur le budget travaux !

Lors d'une rénovation, la première source de matériaux est donc le chantier lui-même. À condition de déconstruire au lieu de démolir. On parle alors de déconstruction sélective, qui consiste à retirer les éléments un à un en vue de les réutiliser.

Par exemple, si on change le sol d’un rez-de-chaussée équipé de carrelages anciens, on peut les faire sauter proprement et les réutiliser pour créer une crédence stylée dans la cuisine ou une frise dans la salle de bain. Cela donne une touche unique et prolonge l’histoire de la maison. Les carrelages anciens reviennent fort à la mode et coûtent cher alors si on ne les réutilise pas, on pourra au moins les revendre. Cela vaut évidemment pour tout ce qu’on peut démonter mais qu’on ne compte pas réutiliser dans son projet.
 

Réemploi de matériaux de construction

Une attention particulière a été portée au réemploi de matériaux présents sur place lors de la reconversion de cet entrepôt en habitation familiale et atelier d’artiste partagé à Molenbeek.
À gauche : les dalles de marbre rouge du couloir ont été démontées et transformées en carrelages pour la douche.
À droite : vu le bon état des tuiles, elles ont été soigneusement démontées avant la réfection du toit puis remises en place.
Photos : © Agwa et Severin Maud. Source : Opalis.

 

Concrètement, avant de penser achat, on dresse une liste de ce qui pourra être réutilisé sur place. Et si on travaille avec des professionnels, on veille à bien les informer que l’on souhaite un démontage soigné.

Certains éléments se prêtent bien à la récupération[2] :

  • La quincaillerie, les éléments de sanitaires ou les boiseries sont faciles à démonter et faciles à réutiliser.
  • Les tuiles, briques et pierres sont des matériaux de gros œuvre qui peuvent trouver une nouvelle vie en rénovation ou pour une nouvelle construction, comme cela se fait depuis des siècles.
  • La ventilation, la plomberie et le chauffage sont des éléments techniques qui peuvent aussi être récupérés mais qui demandent un savoir-faire plus précis pour être réutilisés.

De manière générale, la récupération est plus facile à mettre en œuvre sur des petits chantiers de rénovation ou pour les finitions car on y fait souvent beaucoup de travaux soi-même. Mais certains grands chantiers en ont aussi fait une de leurs priorités.

> Voir nos conseils : Comment faire du réemploi dans la rénovation de sa maison ?
 

3. Acheter des matériaux de récupération

Par définition il est difficile de tout récupérer de son chantier. Si on rénove, c’est aussi pour changer de matériaux, agrandir, moderniser ou remplacer des éléments défectueux.

Pour ce que l’on remplace, on adopte un nouveau réflexe durable : acheter des matériaux de récupération.

On trouve facilement en seconde main :

  • Des matériaux minéraux comme des pierres bleues et d'autres pierres naturelles, des briques, des carrelages, des pavés, klinkers et bordures, des tuiles et couvre-murs...
  • Des matériaux d’une certaine qualité architecturale, par exemple des portes anciennes et leurs encadrements, des vitraux ou boiseries précieuses, des cheminées, des poutres en chêne de moins de 5 mètres…
  • Des châssis, avec ou sans vitrage ;
  • De l’équipement sanitaire (bain, évier, toilette…).

Mais opter pour des matériaux d’occasion nécessite forcément plus de recherches que de se rendre au magasin de bricolage du coin. Alors pourquoi se casser la tête ? Parce qu’utiliser des matériaux d’occasion c’est moins cher et aussi plus écologique.

Derrière une maison se cachent entre 250 000 et 440 000 kWh d’énergie grise. C’est l’énergie qu’il a fallu pour fabriquer tous les composants de la maison. Ça représente plus de 100 ans de consommation d’électricité d’un ménage ![3] Jeter ces matériaux s’ils peuvent encore servir pour d’autres projets, c’est un énorme gaspillage. Quand on choisit d’acheter en deuxième main, on prolonge au contraire leur vie et on favorise l’économie circulaire.

Évidemment on peut recycler certains éléments. Mais le « recyclage » d’une brique consiste bien souvent à l’enfouir sous une route et fondre une poutre métallique requiert beaucoup d’énergie. Dès que c’est possible, on favorise donc l’option la plus écologique : la réutilisation des matériaux tels quels, sans transformation.

> Voir nos bons plans pour trouver et utiliser des matériaux de récupération.
 

Acheter des matériaux de construction de récupération

Dallage, pavés, briques, poutres en bois, tuiles, portes, escaliers, parquet, carrelages, sanitaires, radiateurs, luminaires... On trouve de tout dans les matériaux de construction de récup. Photos : Opalis.
 

4. Bien gérer les déchets du chantier

Sur un chantier, même durable et avec un maximum de récup, on finit toujours par se retrouver avec une pile de déchets.

Selon que ce soit une construction ou une rénovation, on aura plutôt des terres excavées, des emballages, des chutes de matériaux neufs ou plutôt un tas assez varié avec des déchets « inertes » (briques, béton, tuiles, carrelages, verre, etc.), du bois, du métal, des isolants, des plastiques, du matériel électrique…

Par facilité, on fait souvent venir un seul conteneur dans lequel on balance tous les déchets. Mais ça a deux inconvénients :

  • C’est plus cher. Un conteneur de déchets non triés de 10m³ coûte environ 450 à 900€ HTVA. Les conteneurs de déchets triés (bois, inertes…) sont moins chers : +/- 300€ pour 10m³.[4] Le CSTC parle d’ailleurs de prix du simple au double entre des conteneurs « monoflux » et des conteneurs non triés.[5]
  • Ça freine le recyclage. Moins c’est trié, moins les déchets pourront être orientés vers une filière adaptée et être recyclés.

Dans une logique d’économie circulaire, les éléments qui ne peuvent être réutilisés devraient au moins pouvoir devenir une matière première pour un nouveau produit. Dans les faits, les matériaux de construction sont encore assez peu recyclés. Par exemple, 35% des déchets de construction[6] sont des « inertes » recyclés en fondations de routes.[7] Certes, c’est utile mais c’est un usage « unique » : on ne recycle pas la matière pour en faire de nouvelles briques ou blocs de béton. Malgré tout, le recyclage se développe et on adapte progressivement les processus de fabrication pour y intégrer plus de matières issues du recyclage.[8]

Dans tous les cas, si on ne trie pas, ça va être compliqué de recycler… On veille donc à organiser le tri des déchets dès le début du chantier :

  • Pour les grosses quantités, on préfère des conteneurs monoflux, adaptés à un type de déchets.
  • Pour les plus petites quantités, il existe des big bags. Ils ont l’avantage de pouvoir être gardés plus longtemps sans frais supplémentaire, contrairement au conteneur.
  • Pour les petits chantiers, on peut aussi envisager d’aller porter soi-même les déchets au recyparc avec une remorque (dans la limite des quantités autorisées par habitant).

On évite de tout mettre en tas pour trier « plus tard », c’est la meilleure façon de se retrouver à tout mettre dans un conteneur non trié !

> Lire aussi : Comment trier les déchets de chantier lors des travaux ?
 

5. Valoriser les chutes et les restes de matériaux

Rien de pire que de tomber à court de matériaux lorsqu’on est en plein travaux. On a donc tendance à en acheter un peu plus, pour être certain. Et même quand on fait appel à un professionnel, il arrive qu’il demande si l’on veut récupérer les restes (souvent ponctué d’un « parce que moi je n’en ferai rien » !).

Alors une fois le chantier terminé, que faire de ces surplus de bois, parpaings, plaques de plâtre, isolants... ? Certains sont encore neufs et utilisables. Plutôt que de les stocker chez soi, on offre une seconde vie aux restes de matériaux :

  • Garder le nécessaire pour des petites réparations.
    Avoir quelques tuiles, briques ou carrelages en stock pourra toujours servir en cas de casse ou si un démontage est nécessaire. Le bois non traité peut aussi être gardé. Il sera bien pratique pour s’allumer une petite flambée l’hiver ou un barbecue l’été.
     
  • Donner les surplus.
    Le premier réflexe, c’est le bouche-à-oreille. Si on a des matériaux à donner, le plus facile est d’en parler aux voisins, à la famille, aux collègues, aux amis… Il y a certainement des bricoleurs autour de soi qui seraient heureux de récupérer quelques chutes. Sinon, on pense aux donneries, aux ressourceries, à certaines entreprises d’économies sociale…  
    > Voir : Où peut-on donner un appareil, un objet et dans quel état ?
     
  • Revendre les matériaux.
    C’est une bonne manière de récupérer un peu d’argent tout en limitant le gaspillage des ressources. Par contre, des restes de matériaux peuvent être plus difficile à revendre car ce sont en général des petites quantités. Mais on peut tenter sa chance par exemple sur 2ememain, Bricozone ou encore sur Facebook via le marketplace ou des groupes spécifiques.

Bons travaux !

 

[1] Sources : Hausinfo et L’Echo.

[3] Source : Architecture et climat, 2010 « élaboration d’un outil d’aide à la conception de maisons à très basse énergie ».

[4] Prix relevés par écoconso en février 2019

[5] Vers une économie circulaire dans la construction, CSTC, 2020.

[6] Diverses sources, repris du Plan wallon déchets-ressources de 2018 (p.305). Les déchets de construction sont estimés à 16-18 millions de tonnes par an en Wallonie (tous travaux confondus : routes, maisons, entreprises…). 60% sont des terres (quand on creuse pour faire des fondations), 35% sont des inertes et 5% des déchets non dangereux (bois, emballages, plastiques..).  Les déchets dangereux ne sont pas quantifiés (amiante, peintures, bois traité…) dans ce tableau, mais on récupère +/- 10.000 tonnes d’amiante et de déchets spéciaux des ménages par an en Wallonie. Si on ne compte pas les terres (qui ne sont pas vraiment des « déchets » au sens commun du terme), les inertes représentent près de 90% des déchets de construction non dangereux.

[7] Plus précisément : mélange de béton, briques, tuiles et céramiques ne contenant pas de substances dangereuses.

[8] Même si l’incorporation de granulats recyclés se fait de plus en plus pour fabriquer de nouveaux matériaux. Source : CSTC, Utilisation de granulats de béton recyclés dans le béton, juillet 2019.

 

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