Chaque année, plus de 2 milliards de jeans sont vendus dans le monde. Logique, le jeans est devenu un des emblèmes de la société de consommation actuelle. Il est présent sur toute la planète et dans toutes les catégories sociales. Mais la production du blue jeans soulève plein de questions, éthiques et environnementales.

Des modes de production qui dégradent l’environnement

Le jeans, c'est du coton. Or, la culture du coton est hautement toxique : elle consomme 16 % des insecticides utilisés dans le monde. Sur chaque hectare de coton, 1 kg de pesticides dangereux est répandu annuellement. D'autres substances chimiques interviennent : par exemple, afin d’accélérer l’ouverture des capsules de coton, l’utilisation de défoliants est fréquente.

Par ailleurs, toute la production du jeans, de la culture jusqu'à la finition est gourmande en eau. Le Water Footprint Network  nous apprend qu'un seul jeans consomme jusque 11.000 litres d'eau à travers l'irrigation des cotonniers, la manufacture du jeans ou encore le traitement des eaux usées polluées.

La culture du coton est un des grands responsables de la disparition progressive de la Mer d’Aral : c’est dans cette région que l'on trouve la grande majorité des cultures de coton irriguées. Une partie considérable de la production est destinée à l'exportation et les consommateurs de l'Union européenne contribuent ainsi pour 20% au dessèchement de la mer d'Aral (1). 

La phase d’ennoblissement correspond à l’ensemble des traitements subis par le coton pour devenir du fil puis du denim (teinture, traitement anti-rétrécissement…). Pour ces procédés les fabricants utilisent des substances synthétiques toxiques (contenant par exemple du formaldéhyde pour la résistance au froissement). Outre les dangers que ces substances représentent pour les travailleurs, les conséquences pour l'environnement peuvent être désastreuses si le jeans est produit dans un pays avec une législation environnementale lacunaire.

Qui fabrique nos jeans ?

Les usines de fabrication, teinture, découpe et confection sont délocalisées dans des pays du Sud où les ouvriers (souvent des femmes), travaillent en dehors de toute réglementation sociale, avec des cadences infernales et bas salaires.

De plus, ils y subissent les effets polluants des produits chimiques utilisés ou des procédés de sablage. Le sablage est une technique pour donner un look "usé" au jeans. Les ouvriers projettent du sable sous pression, dans un local confiné, sans protection respiratoire, souvent pendant 12 heures par jour. Sabler des jeans pour les vieillir peut provoquer la silicose des poumons, une maladie incurable et mortelle. Pour les marques, c'est tout bénéfice : procédé bon marché et prix de vente plus élevé. Pour les travailleurs, c'est un désastre.

Se pose alors la question des engagements éthiques des grandes entreprises. Retrouvez plus d'infos sur le site de l'association AchACT.

Le juste prix d’un jeans

Le tableau ci-dessous qui décompose de manière approximative le prix « social » d’un jeans, indique que les ¾ du prix ne sont pas liés aux aspects production :

Commerce de détail et TVA 50 %
Marque (administration, marketing et marge) 25 %
Usine de confection dans un pays à faible revenu, hors main-d'oeuvre (Matières premières, fonctionnement et marge) 13 %
Transport, taxes 11 %
Main d'oeuvre confection 1 %

Source : AchACT

Aujourd’hui, toute l'activité est clairement orientée vers la minimisation des coûts de production au détriment de l’environnement et de conditions de travail décentes.

Pour les textiles en général, les marques ayant une plus-value environnementale ou sociale sont souvent plus chères. Cela s’explique par une rémunération correcte des ouvriers et à l’approvisionnement en matières premières de qualité.

Choisir son jeans en connaissance de cause

Face à ces constats, que pouvons-nous faire en tant que consommateur ?

Résister aux sirènes du marketing ! « Acheter moins pour acheter mieux » s’applique plus que jamais au jeans et à nos vêtements en général.

Incités par la mode, nous gardons de moins en moins longtemps notre cher pantalon. De plus, sa durée de vie varie selon sa qualité. Pourtant, c’est logique, garder un jeans plus longtemps c’est éviter la production d’un nouveau pantalon et donc ses impacts. Choisissons donc un jeans bien taillé dans une toile de qualité, gage de durée ! On privilégiera également un pantalon non coloré, non délavé afin d’éviter les lavages successifs, l’utilisation de chlore et les procédés de sablage mortels pour les travailleurs.

Il existe des labels écologiques pour les textiles (voir fiche-conseil n°135). Ils garantissent que des normes strictes sont respectées pour limiter les impacts sur l'environnement et la santé et pour favoriser de bonnes conditions sociales de fabrication. Concernant le jeans, ils sont malheureusement trop peu connus et répandus. C’est pourtant un article de consommation de masse.

En dehors des articles labellisés, il existe des jeans à plus faible impact environnemental. Après avoir constaté que la finition d'un jeans consomme 42 litres d'eau, l'entreprise Levi Strauss a apporté quelques modifications simples au procédé de finition. Modifications qui permettent de réduire la consommation d'eau de 28% en moyenne. D'autres marques comme Kuyichi ont également créé des gammes à moindre consommation d'eau (2).

Questions sociales et éthiques

D’un point de vue social et éthique, il est difficile de savoir à quel jeans se vouer.

Posons-nous la question de savoir si la marque a un code de conduite. Si oui, ce code est-il conforme aux droits fondamentaux des travailleurs édités par l’OIT et aux règles de base concernant le salaire ? Nous pouvons nous informer sur les engagements des fabricants et choisir des marques impliquées dans un code de conduite fort, défini et mis en œuvre avec un système multipartite de contrôle comme celui de la Fair Wear Foundation.

Pour nous aider à y voir clair, AchACT répertorie des informations sur les différentes marques de textiles à cette adresse : http://www.achact.be/Marques.htm

Bien entretenir son jeans : un pli à prendre

Si une partie des impacts environnementaux d’un jeans sont attribuables à sa production, il n’en reste pas moins que son entretien peut être plus ou moins polluant selon nos habitudes.

Gardons les bons réflexes : lavage à basse température et dosage correct de la lessive, pas d’assouplissant, séchage à l’air libre, pas de fer à repasser, pas de nettoyage à sec !

Jeans trop petit, trop grand, démodé ? S’il est encore en bon état, on peut le revendre ou même le donner. Les organismes regroupés dans le réseau « Ressources » ont créé un label éthique « Solid’R » certifié par Ethibel qui garantit que les textiles récupérés nourrissent l’activité d’une entreprise sociale. S’il est usé, transformons-le en short, en sac, en chiffons…

Marquons nos préférences

On le sait bien, les grandes marques de jeans sont à l’affût des moindres évolutions de la demande. A nous de marquer nos préférences pour des vêtements de qualité et produits durablement. L’enjeu consiste à sortir du cercle vicieux dans lequel le consommateur se sent prisonnier de ce qu’on lui offre et où les fabricants se retranchent derrière le prétexte du manque d’intérêt des consommateurs pour ne pas modifier leurs pratiques.

Aujourd’hui, dans le secteur du textile se pose plus que jamais, la question éthique comme la question environnementale. Ce sont les emplois au Nord, les conditions de travail au Sud et l’environnement de la planète qui sont en jeu !

Sources

1. http://waterfootprint.org/media/downloads/Report18.pdf

2. Ethical Consumer

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Dernière mise à jour
01 juillet 2015
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