Militants, éco-anxieux, indifférents… Comme leurs parents, les jeunes ont des réactions variées face aux enjeux autour de l’environnement et du climat.

On aimerait accompagner son ado au mieux mais on se demande comment. L’adolescence apporte son lot de difficultés de communication. Comment mettre les enjeux environnementaux sur la table sans se faire rabrouer à coup de jeux vidéo et de répliques pas toujours roses ?

On commence par ne pas sous-estimer les ados. Ils sont parfois plus sensibilisés qu’on le croit. 81 % des jeunes de 14 à 19 ans trouvent qu’il est important de se mobiliser pour l’environnement et le climat[1]. Mais ils s’inquiètent pour l’avenir et ne savent pas toujours comment agir.

Alors on invite les sujets dans la maison, on les décortique à table, en famille et on se laisse porter par leurs idées.

Besoin d’inspiration ? Voici 8 propositions pour parler environnement avec son ado et agir en famille.

Sommaire :

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Discuter des enjeux en éveillant l’esprit critique

Les jeunes ont conscience de l’urgence climatique mais, paradoxalement, ils connaissent plutôt mal les mécanismes et enjeux liés au réchauffement climatique, selon une étude menée en 2019 par l’APED (Appel pour une école démocratique)[2]. Par rapport à une précédente enquête, le sentiment d’urgence est même en hausse alors que le niveau des savoirs est en baisse. Ce constat inquiète l’ADEP qui rappelle que « le climatoscepticisme se nourrit surtout de l’ignorance ».

Certaines études mettent en avant la difficulté pour l’ado d’agir toujours en accord avec ses valeurs. Il s’agit de la dissonance cognitive de la génération Z (dont les ados font partie[3]) : « Avoir conscience de l’urgence climatique tout en vivant dans un système qui s’articule autour de la consommation mène la Gen Z vers la dissonance cognitive, c’est-à-dire que ses comportements – fortement influencés par la publicité, les réseaux sociaux, la pression sociale, les habitudes consuméristes sociétales déjà bien ancrées – peuvent se heurter à ses valeurs »[4].

On pense aussi à toutes les formes de greenwashing qui se présentent aux ados qui n’ont souvent pas encore les clés pour repérer ce mécanisme publicitaire.

> Lire aussi : Se méfier du greenwashing

On saisit donc toutes les occasions pour éveiller l’esprit critique de son ado, lui faire comprendre les enjeux environnementaux et sociaux ainsi que les façons dont on peut agir. Par exemple, à l’occasion d’un achat :

« Ma fille m'a demandé de l'argent pour un acheter un sweatshirt "à la mode" d'une grande marque. Je lui ai dit : "D'accord, je te donnerai de quoi t'acheter ce pull mais, d'abord, on va s'asseoir et discuter de cet achat". Elle ne me croyait pas, elle pensait que je voulais juste la dissuader. Je lui ai promis que je lui donnerais les sous, quoi qu'elle décide. Elle a accepté. On a pas mal discuté, je l'ai questionnée, j'ai apporté les infos que j'avais pour alimenter la réflexion. C'était vraiment intéressant comme échange. Happy end : au final, elle a décidé de ne pas acheter ce pull. Mais si elle avait choisi l'inverse, j'aurais respecté ma parole. »
Catherine, maman de 3 ados

Les parents ont vraiment un rôle à jouer dans l’information. Désormais, les jeunes se renseignent davantage via des canaux informels et non journalistiques (amis, école… et parents !)[5]. On peut donc les accompagner et les aider à traiter les infos qu’ils reçoivent via les réseaux sociaux, Internet, les amis…

Certes, mais en tant que parent, on n’est pas forcément un spécialiste de l’environnement. Comment répondre à leurs questions ?

Ça tombe bien, les ados n’ont pas besoin qu’on leur assène des vérités. On va plutôt poser des questions. À eux de trouver les réponses (on peut participer aux recherches !) ou d’enrichir la discussion avec leurs trouvailles.

Par exemple :

  • Au lieu de dire « Ça ne sert à rien de t’acheter encore une nouvelle robe ». Essayer : « As-tu besoin d’une nouvelle robe pour le bal de rhéto ? Peux-tu la louer ou l’acheter en seconde main ? Quels seraient les bénéfices ? »
  • Au lieu de dire : « Non, un nouveau Smartphone c’est polluant », dire « Pourquoi veux-tu un nouveau téléphone ? Le tien ne fonctionne-t-il plus bien ? Est-il possible de le réparer, de remplacer la batterie ? Si pas, pourrait-on racheter un smartphone reconditionné ? »

Ceci encourage les jeunes à réfléchir par eux-mêmes, à trouver les réponses et à développer ainsi leur propre conscience écologique.

Parler environnement avec son ado

On peut aussi partir d’un film, d’un documentaire, d’une vidéo, d’un livre pour lancer la discussion. C’est une autre opportunité que Catherine a saisie :

« Je me suis assise devant la télé et j'ai vu qu'ils annonçaient une émission spéciale sur les dessous de la mode. Une de mes ados passait derrière moi à ce moment, je lui ai proposé qu'on regarde ça ensemble. À un moment, on voyait le patron d'une marque de fast fashion qui se pavanait devant la caméra. Puis le journaliste lui pose des questions sur les salaires et les conditions de travail scandaleuses de ses employés. Changement d’ambiance, le patron a refusé de répondre et a demandé aux agents de sécurité de sortir le journaliste. On en a parlé après avec ma fille, c'est un documentaire qui l’a vraiment marquée, bien plus que si moi, sa mère, j’avais abordé le sujet ».

Catherine

Où trouver ces ressources ?

> Voir : Films, livres, podcasts… pour aborder l’écologie avec des ados.
 

Montrer les avantages

Quelle porte d’entrée choisir pour aborder l’environnement ? Chacun fait ses premiers pas dans l’écoconsommation selon ses affinités : zéro déchet, végétarisme, cosmétiques maison, vêtements de seconde main…

Ces choix peuvent être guidés par des préoccupations pour le bien-être animal, le sort de la planète, le budget, l’envie de faire partie d’un mouvement de groupe, l’éco-anxiété… Chacun possède sa propre sensibilité et donc ses propres incitants pour monter dans le train de l’écoconsommation. Alors on écoute et on soutient son ado.

Un ado est plutôt touché par le bien-être animal et souhaite diminuer sa consommation de viande ? Super, c’est bon pour la planète, pour la santé et pour la biodiversité.

Il ou elle achète ses vêtements en seconde main ? On discute des avantages pour la planète, le portefeuille, la création de sa propre identité (le vintage est à la mode !)… Même pour les jeunes, le coût fait partie des principaux freins à l’adoption de gestes écologiques[6]. On n’hésite pas à montrer que mieux consommer, ça peut être plus économique !

On peut donc être une force de proposition et ne pas se décourager si la sauce ne prend pas avec tous les sujets environnementaux.
 

Se lancer des challenges en famille

Les jeunes ont envie de se mobiliser, conscients que chacun doit faire un effort pour participer à la solution. Ils se disent prêts à consommer davantage de produits locaux, mettre un gros pull au lieu d’allumer le chauffage, privilégier le vélo ou les transports en commun et même manger moins de viande.

Gestes préférés des jeunes pour le climat

Source : Enquête « École, savoirs, climat » de l’APED.

 

Mais les deux principaux freins à l’action sont le côté pratique et tout simplement… l’oubli[7]. Plutôt que répéter en boucle « éteins la lumière », si on trouvait des façons amusantes de progresser ensemble ? Par exemple en se lançant des défis en famille.

Devenir une famille zéro déchet

Voilà une idée ludique pour parler environnement en famille : se lancer dans un mode de vie zéro déchet. En 2016, Jérémie et Bénédicte partageaient leurs aventures dans le livre « Famille (presque) zéro déchet ». Leur défi raconté avec humour et leurs astuces compilées dans cet ouvrage ont donné un nouveau souffle au mouvement zéro déchet (un jeu de société a même été édité). Il s’inscrit dans les pas de Béa Jonhson qui fait tenir sa poubelle annuelle en un bocal de 25 cl grâce à son mantra : « Refuser le superflu, réduire le nécessaire, réutiliser ce que l’on achète, recycler tout ce que l’on n’a pas pu refuser, composter le reste ».

> Voir : 7 astuces zéro déchet pour alléger sa poubelle au quotidien

C’est aussi avec cet angle d’attaque que la famille Pirenne entre dans l’écoconsommation. En 2019, Julie, la maman, a lancé un défi à son mari et ses enfants : « plus aucun plastique ne rentre à la maison ! ». Un challenge qui a emballé la famille dont les trois ados ont chacun apporté leur pierre à l’édifice : végétarisme, vêtements uniquement de seconde main, cosmétiques maison, participation à Youth for Climate…

> Écouter leur témoignage dans l’épisode 5 du podcast « écoconso & vous ».

Relever le défi « Février sans supermarché »[8]

C’est aussi une bonne occasion de mettre le pied à l’étrier. On se donne l’objectif, durant un mois, de ne pas mettre les pieds dans une grande enseigne. L’occasion de découvrir de nouvelles adresses, de réfléchir à ses menus et recettes en famille, de tester des encas maison…

> Voir : Février sans supermarché : on (re)met le couvert ?

Participer à « Second hand septembre »

Lancée par Oxfam, cette action met au défi de dire « yes to less » (« oui à moins ») et de n’acheter que des vêtements de seconde main à la rentrée. La thématique des vêtements est particulièrement importante pour les ados. On les encourage à pousser la porte des magasins de seconde main pour trouver la pièce ou le look qu’ils veulent adopter. Il y a fort à parier qu’ils trouveront rapidement leur bonheur ! On profite de l’occasion pour organiser un tri dans les garde-robes de toute la famille.

Rodrigue, papa de trois ados, témoigne dans le l’épisode 5 du podcast « écoconso & vous » : « On va se faire un autre petit défi : si j’achète un t-shirt, par exemple, il faut qu’il y ait deux pièces qui disparaissent de la maison. Une pièce qui rentre, deux pièces qui sortent. Ça permet de réduire la quantité pour aller presqu’à l’essentiel ». Une bonne manière de démarrer ?

> Lire aussi : 4 astuces pour des vêtements à la mode sans acheter neuf.

Diminuer le temps numérique

Pour ce qui est du temps passé devant les écrans, et surtout derrière les smartphones, les parents sont souvent autant coupables que leurs ados. Alors pourquoi ne pas faire l’exercice ensemble ? On estime chacun le temps qu’on pense avoir passé sur notre smartphone aujourd’hui. Ensuite, on va dans les paramètres du téléphone pour regarder les résultats dans le menu « bien-être numérique ». Nous voilà devant des chiffres objectifs. Le temps de smartphone est affiché et la répartition entre les applications ne ment pas. Des parents ou des enfants, qui a passé le plus de temps sur son téléphone ? Quel défi va-t-on se lancer ? Réduire chacun son chiffre de 25 %, par exemple ?

> Lire aussi : Comment diminuer son empreinte numérique ?

Des applications peuvent encourager à rompre avec des mauvaises habitudes de « tout-au-smartphone ». « Forest », par exemple, propose à l’utilisateur de planter des arbres fictifs. Le but est de créer une forêt. Dès qu’on déverrouille le téléphone, les arbres dépérissent. Pour faire plus simple, on peut aussi suggérer de couper les notifications du téléphone qui nous interrompent à toutes les heures de la journée.

On peut aussi discuter ensemble de règles de famille sur le sujet. Par exemple, couper le WiFi à partir d’une certaine heure, pas de téléphone à table, voire même lancer un système de « boite à smartphones » pour mieux profiter des moments passés ensemble.

Le meilleur cuisinier

Envie de diminuer sa consommation de viande ? Et si on instaurait une tournante pour préparer un repas végétarien par semaine. Puis on vote pour la recette qu’on a préférée (et on se fait son livre de cuisine perso au passage !). On en profite pour se renseigner sur les alternatives aux protéines animales et tester de nouvelles saveurs.

> Lire : Manger moins de viande, par où commencer ?

On peut répéter le défi avec la préparation de collations saines. C’est un bon moyen de discuter de ce qu’il y a comme additifs et conservateurs dans les produits issus du commerce. En plus, en cuisinant les goûters, on se rend compte de la quantité de sucre qu’ils contiennent et on peut essayer de réduire la dose. 

« À la rentrée, on a décidé de ne plus acheter de collations industrielles. Du coup, chaque week-end, on teste une nouvelle recette. En plus, on remplace parfois le beurre par un légume pour des en-cas encore plus sains ! »
Bernadette
 

Proposer des modèles inspirants

Il est parfois difficile d’entrer en communication directement avec son ado. Alors, pourquoi ne pas laisser trainer quelques noms de comptes à suivre sur les réseaux sociaux ? Un jeune suivra parfois plus volontiers quelqu’un qui lui ressemble plutôt que ses parents. C’est un mélange de mimétisme et d’appartenance à une tribu qui opère souvent à cet âge. « Ils s’habillent tous pareil, écoutent la même musique, ont les mêmes centres d’intérêt. L’esprit tribu le rassure : se conformer au modèle de la bande le délivre pour l’instant du fardeau d’avoir à se tracer son propre itinéraire. Les copains sont le repos de l’adolescent ! »[9].

On sait aussi que, pour cette génération, les réseaux sociaux font pleinement partie des sources d’information (65 % des 16 à 25 ans utilisent les réseaux sociaux pour s’informer, principalement sur Instagram). 40 % d’entre eux passent même entre 2h et 5h par jour sur les plateformes sociales[10].

Alors, on mise sur la communication entre pairs ou via des influenceurs (d’autant que les jeunes se méfient des politiciens et des médias[11]). Même le GIEC, dans son dernier rapport, mettait en avant le rôle que pouvaient avoir les leaders d’opinions et les influenceurs dans la résolution de la crise climatique[12].

Voici quelques propositions de comptes à suivre…

  • On ne présente plus l’activiste Adelaïde Charlier, la « Greta Thunberg belge ». Elle est à suivre sur Instagram ou TikTok et on vous conseille le documentaire « La meuf du climat ». Toujours en matière de climat, il y a aussi Colas Van Moorsel.
     
  • Paie ton influence est un collectif qui questionne et interpelle les influenceurs sur les questions climatiques. Il a mis en place, en collaboration avec le compte « À quand demain ? », la charte éthique de l’influence responsable.
     
  • Ecotok est un compte rassemblant des jeunes militants écologistes de la génération des « millenials ». Il diffuse des bonnes pratiques environnementales. Les hashtags #ecotok et #climatechange sont à suivre sur TikTok pour voir passer les vidéos écolos dans son fil.
     
  • Sandrea parle de son « sevrage de la fast fashion » sur sa chaine Youtube.
     
  • Peau neuve partage des alternatives naturelles testées et approuvées dans une foule de domaines (visage, corps, cheveux, lifestyle, alimentation, mode…).
     
  • Sur Instagram, Juliet Bonhomme publie autour de l'upcycling et Lou Peeters sur la slow fashion. Au rayon cuisine, Alice Esmeralda et Maya partagent des recettes vegan.

On peut suggérer ces pistes mais on n’hésite pas à encourager ses enfants à faire preuve d’esprit critique dans l’adoption de nouvelles modes, même écologiques. On incite à réfléchir : est-ce que voir ces messages et photos te fait du bien ? Est-ce que tu as l’impression que ça t’aide à trouver des solutions ? Est-ce que tu aimerais leur ressembler ? Pourquoi ? Pas de critique, pas de jugement mais des questions pour prendre de la distance.

Des influenceurs qui s'intéressent à l'environnement

 

Écouter et soutenir leurs initiatives

Les jeunes bougent ! Ils étaient encore 45 000 à se mobiliser pour Stand Up For Climate le 21 octobre dernier.

On se sent plus forts à plusieurs, en créant du lien plutôt qu’en faisant des efforts tout seul dans son coin[13]. Certains jeunes profitent de cette force et s’organisent au sein de structures collectives comme Youth for Climate, Mindchangers, les Maisons de Jeunes Vertes, Eco-teens, les activités d'Empreintes, les JM Oxfam, Corporate ReGeneration (pour les plus de 18 ans)...

Les 16-17 ans pensent en majorité qu’il faut changer à la fois le système et leur mode de vie[14]. Ceci dit, on constate un certain désengagement de l’action collective classique (surtout politique). L’engagement ne séduirait que 10 % des jeunes[15]. Plutôt que militer, ils préfèrent souvent les actions individuelles : signer une pétition (51%), réagir sur internet (40%), boycotter des lieux, marques (32%).

les jeunes pratiquent l'action individuelle plutôt que l'action collective

Source : « Ce qui mobilise les jeunes. Valeurs, centres d’intérêt et positionnement des jeunes en Fédération Wallonie-Bruxelles », Annoncer la couleur et Enabel.

Démarche collective ou individuelle, quelle que soit la voie qu’il choisissent, ils ont besoin de soutien. Avec des jeunes de plus en plus sensibilisés à l’environnement, il n’est pas rare que ce soient eux qui apportent ces questions au sein des familles. Ils donnent alors l’exemple. Mais est-on prêt à les écouter ?

Quand son enfant questionne l’utilisation de la voiture, le fait de prendre l’avion pour les vacances, l’usage de certains produits d’entretien ou encore la consommation de viande, va-t-on se moquer, l’envoyer balader ou tenir compte de ses propositions ? Quand on est challengé dans ses habitudes, la réponse n’est parfois pas si évidente[16]. Les parents font partie d’une génération qui a grandi avec la société de consommation et ne voit pas toujours pourquoi elle s’en priverait volontairement. Et puis on est adulte, on n’a pas envie de « se faire dicter son comportement » ! Plus que jamais à l’adolescence, il est important de maintenir le dialogue. Pas besoin de dire oui ou non dans l’instant mais on peut accueillir les propositions et en discuter. Et peut-être au final se laisser convaincre…

Dans ce domaine, on oublie l’idée d’une éducation descendante des parents vers les enfants et on laisse de la place aux interactions. C’est une forme d’enseignement mutuel, même quand on est un parent déjà sensible à l’écologie.

Rodrigue, papa de 3 ados, explique :

« On nous renvoie la balle, et en même temps je crois qu'elle rebondit de l'un à l'autre. Nous on avait proposé l'idée il y a 3 ans [bannir le plastique de la maison], et finalement chacun de la famille a eu des idées pour l'autre et j'ai l'impression que ça circule, c'est pas du tout pyramidal. Chacun apporte ce qu'il a envie d'apporter comme effort, l'avion, les vêtements, la nourriture, et puis, finalement chacun s'équilibre et on s'envoie des idées l'un l'autre. »

> Écouter tout le témoignage dans l’épisode 5 du podcast « écoconso & vous ».

D’autres parents témoignent aussi en ce sens :

Marc « a élevé ses enfants à la campagne, en les incitant à éteindre la lumière et à ne pas gaspiller. Finalement, c'est sa fille qui l'a éveillé à la permaculture, l'a poussé à se déplacer à vélo et à réduire sa consommation de viande. Il s'en amuse aujourd'hui : "Ça nous est revenu comme un boomerang !" »[17].

Les jeunes guettent la réaction des autres : amis, famille… Ils cherchent à être confortés dans leurs actions. Afficher leur engagement, c’est prendre le risque d’être confrontés dans leurs choix. Pour cette raison notamment, certains hésitent à afficher leurs idées environnementales sur les réseaux sociaux. Ils craignent la désapprobation ou de « saouler » les autres. Pour certains, cette crainte pourrait aller jusqu’à inhiber l’action elle-même. Ceci pourrait notamment expliquer l’écart entre la conviction qu’il faut agir… et le fait de réellement passer à l’action[18].

Il s’agit donc de s’intéresser à leur démarche et les soutenir, même si on ne s’implique pas personnellement. Ils n’ont pas forcément besoin d’être accompagnés mais on peut saluer leurs initiatives, s’adapter à leur végétarisme, les soutenir dans leur choix de participer aux marches climat, encourager leur projet d’organiser un camp zéro déchet...

De cette façon, on les aide à « prendre confiance en leur capacité à agir, se responsabiliser et renforcer leur sentiment d’appartenance à une société en transition »[19].
 

Montrer l’exemple

Pour plus de 9 jeunes sur 10, la famille occupe une place importante[20]. Alors, en tant que parent, quel exemple donne-t-on ? Les enfants se nourrissent de ce que les adultes disent, mais aussi de ce qu’ils font au quotidien. Il ne suffit pas de parler, il est important de joindre l’acte à la parole et d’être conscient du rôle de modèle que l’on a. Pas besoin d’être parfait mais on évite de tenir un discours et de faire l’inverse. Dire ce qu’on fait et surtout faire ce qu’on dit !

C’est parfois plus tard que l’on découvre que les graines qu’on a plantées ont germé.

« Ma fille aînée Lola (sans doute la moins sensibilisée de la famille) est revenue d'une soirée en kot où elle avait été dégoûtée de voir tout le plastique que les jeunes achetaient dans le cadre de leurs achats de bouffe. Elle m’a dit qu’elle était très fière de moi qui fais mes achats en vrac, qui fais partie d’un supermarché coopératif... Pour moi, c'est l'exemple qu’on donne aux ados qui les met sur la voie. Peut-être même plus que les discours sur l'environnement. »
Catherine

Écologie : montrer l'exemple à ses enfants

On n’hésite pas à parler aussi de ses contradictions, des sentiments qui nous animent. Si l’ado souffre d’éco-anxieté ou fait face à des dilemmes, cela peut le rassurer de savoir qu’il n’est pas seul et qu’on ressent cela également. Les parents évitent souvent de parler de ces vérités douloureuses à leurs enfants. Pourtant, pour Laelia Benoit, pédopsychiatre et diplômée en sociologie : « Il faut expliquer aux enfants nos valeurs, ce pourquoi on change une habitude. Si les parents ne racontent pas qu’eux aussi sont inquiets et prêts à changer des choses, les plus jeunes se sentent très seuls et entourés d’adultes indifférents. » [21]
 

Partager des expériences

« À l’aide, mon ado ne me parle plus et ne veut plus rien faire avec moi ! ». À l’adolescence, les enfants peuvent s’éloigner, voire s’opposer, à leurs parents. C’est un processus normal, qui fait partie de leur autonomisation[22].

Dans cette période, il peut paraître encore plus difficile de faire passer des messages autour de l’écologie et de la consommation. Et si au lieu de discuter de ces sujets, on partageait des expériences ? Une façon comme une autre de maintenir le lien.

« Moi j’ai envie de donner plein de choses à mes enfants, de leur proposer plein d’activités, mais je me dis : « Stop arrête-toi : être ensemble et prendre du temps ensemble c’est super important.» Même si je veux leur donner plein de choses que je n’ai pas eues, prendre du temps ça n’a pas de prix à long terme. » [23]
Marie

Quelques idées d’activités à faire ensemble :  

  • Marcher pour le climat.
     
  • Planter des arbres dans son jardin ou dans un jardin partagé.
     
  • Aller cueillir des fruits ou des légumes directement au champ.
     
  • Rejoindre une action locale collective comme un chantier participatif. Les jeunes sont plus motivés par rapport à ce qui se passe près de chez eux[24].
     
  • Passer un moment ensemble dans la nature. Le contact avec un environnement naturel jouerait un rôle important dans l’envie de protéger l’environnement. Il y a des chantiers nature, des journées d’entretien dans les réserves naturelles (à guetter sur l’agenda de Natagora). Ou tout simplement une balade en forêt, un pique-nique au bord de l’eau ou un tour à vélo. Une bonne habitude à prendre dès le plus jeune âge !
     
  • Participer à un ramassage de déchets. Chez écoconso, on a entendu beaucoup d’histoires de prises de conscience qui ont commencé par… les déchets. Un ramassage c’est une action ponctuelle, qui n’engage les participants que pour quelques heures. Mais voir ainsi la quantité de pollution dans des espaces qui sont familiers, proches de chez soi, ça peut créer un déclic.
     
  • Faire un atelier de customisation de fringues ou une session à la maison, sur base d’un tutoriel. L’occasion de faire un peu de DIY et d’exercer sa créativité tout en abordant la question des vêtements.
     
  • Aller au cinéma ensemble quand sort un film lié à l’environnement ou regarder ensemble un film ou un documentaire.
    > Voir : Films, livres, podcasts… pour aborder l’écologie avec des ados.
     
  • Préparer des repas ensemble. C’est aussi une bonne solution pour passer du temps en famille.

« Avec ma fille, on a instauré une soirée par semaine où on décide ensemble de ce qu’on va manger et on cuisine à deux. C’est aussi une bonne excuse pour passer du temps en famille. »
Benoit

Cuisiner ensemble

 

Ne pas être un parent chiant et moralisateur !

Attention aux reproches. Même s’il est fatiguant de répéter dix fois d’éteindre la lumière ou de voir son enfant acheter encore de la fast fashion, il ne sert à rien de le culpabiliser. Le risque est qu’il se braque et qu’il n’y ait plus de dialogue. On va plutôt poser des questions, essayer de comprendre et surtout inviter l’ado à réfléchir par lui-même, sans lui donner de réponse toute faite. Il est bon dans ce contexte de se rappeler les étapes de la communication non-violente : on observe la situation, on exprime son ressenti, on formule ses besoins et on établit une demande claire à l’autre[25].

Même dans des enquêtes réalisées auprès de jeunes plutôt motivés par l’environnement, la majorité se considère plus comme sympathisante que militante.

Les jeunes sympatisants plutôt que militants

Question posée à des jeunes belges de 16-17 ans dans l’enquête « Il est temps ».

 

Il est important de respecter ce choix personnel. On peut faire des propositions et soutenir cet intérêt (notamment avec certaines des idées proposées dans cet article), mais sans forcer.

On aborde les sujets avec bienveillance, sans rechercher le perfectionnisme. Il ne faut surtout pas mettre le sort de la planète entière sur leurs épaules. On sait d’ailleurs que certains jeunes se disent « en colère »[26] sur les générations précédentes et se sentent abandonnés par les politiques.

On se méfie des discours alarmistes qui risquent de les angoisser. L’anxieté face à l’avenir est déjà une réalité pour bien des jeunes. Lors d’une enquête du Forum des jeunes, ceux-ci expriment notamment qu’ils craignent particulièrement un manque de ressources alimentaires, énergétiques, de matières premières et d’eau potable[27].

Si on donne trop l’impression que l’avenir est foutu, on risque aussi d’encourager un effet « carpe diem » (profitons maintenant tant qu’il est encore temps) et de décourager les efforts à longs termes, pourtant bien nécessaires en matière d’écologie[28].

On essaye plutôt d’être constructif, inspirant, on les aide à se projeter dans un futur désirable et on propose des actions pour aider à le construire, que ces actions soient un ensemble de « petits » gestes, des futurs choix de vie (« tu te vois vivre sans voiture ? mais du coup tu vivrais où ? ») ou des actions de militance.

Véronique Lapaige, médecin-chercheur en santé publique et en santé mentale, précise : « Il faut les laisser respirer, éviter de répéter en boucle à quel point notre monde est voué à une fin terrible, et limiter la consultation continuelle des réseaux sociaux sur ces sujets car ressasser ces mauvaises nouvelles en permanence constitue un facteur de mal-être important. Et puis, il ne faut pas oublier que ce n’est pas parce qu’on s’engage qu’on ne peut plus rire ou s’amuser… » [29].

Les enjeux sont sérieux mais on peut essayer de rester ludique, parfois même léger. Le meilleur incitant à changer son comportement… c’est d’y prendre du plaisir. C’est parti !

 

[2] Enquête « École, savoirs, climat » de l’APED (Appel pour une école démocratique) menée auprès de 3259 élèves de la fin du secondaire en Belgique, 2019.

[3] La génération Z comprend +/- les personnes nées entre 1997 et 2010.

[5] « Ce qui mobilise les jeunes. Valeurs, centres d’intérêt et positionnement des jeunes en Fédération Wallonie-Bruxelles », étude réalisée par Annoncer la couleur et Enabel en 2019 auprès de 500 jeunes de 14 à 19 ans.

[7] Idem.

[8] Le collectif suisse « En vert et contre tout » est à l’origine de l’initiative.

[12] « Social influencers and thought leaders can increase the adoption of low-carbon technologies,behaviours, and lifestyle’”, IPPC 2022, p 170.

[16] Comme en témoignent les commentaires de plusieurs jeunes sur le forum du magazine Madmoizelle par exemple.

[28] « Se contrôler à l’adolescence. Entre contraintes cérébrales et possibilités environnementales », Virat, Maël, et Jérôme Clerc, dans "Les Cahiers Dynamiques", 2017.

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