Écobilan & bilan carbone : 5 questions pour mieux les comprendre

Comprendre l'écobilan et le bilan carbone
Comprendre l'écobilan et le bilan carbone

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Comment sait-on si un produit est écologique ? Grâce à son écobilan. Définition, éléments analysés, fiabilité, écueils... On décrypte l'outil, exemples à l’appui.

L’écobilan et le bilan carbone évaluent l’impact d’un produit sur l’environnement. Ils aident ainsi à objectiver le débat et faire « le bon choix ». Zoom sur un outil très intéressant, mais qui a ses limites.

Sommaire :

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Qu’est-ce qu’un écobilan ?

Analyse de cycle de vie (ACV), Life-cycle analysis (LCA), PEF (Product environmental footprint), écobilan : ces termes renvoient tous vers une analyse du cycle de vie d’un produit.

L’idée ? Comparer des « façons différentes de faire la même chose ». L’analyse se fait du « berceau à la tombe », c’est-à-dire depuis la fabrication de ce que l’on souhaite comparer jusqu’à sa fin de vie (recyclage, incinération…) en passant par son utilisation, sa distribution…[1]

On pourrait par exemple choisir de comparer différentes bouteilles d’eaux minérales pour déterminer quel est le type de bouteille qui a le moins d’impact. L’écobilan comparera ainsi une bouteille réutilisable en verre, une bouteille en plastique, une bouteille jetable en verre, une bouteille en plastique recyclé… Toutes ces bouteilles font « la même chose » : emballer un litre d’eau pour l’amener au consommateur. C’est ce qu’on appelle l’unité fonctionnelle.

On pourrait aussi ajouter l’eau du robinet à la comparaison. On comparerait alors quelle est la façon la plus « écologique » de boire de l’eau (et pas seulement quel est le meilleur emballage).

De quoi tient-on compte ?

Pour permettre la comparaison on doit notamment :

  • Définir les objets que l’on compare. 
    Quelle matière, quelle taille de bouteille ? Si on veut comparer des sacs pour transporter 22 litres de courses et qu’un des sacs à comparer ne fait que 20 litres, doit-on en prendre deux ? Si on compare de la viande et des lentilles, que prend-on comme critère de comparaison : les calories, le poids ou l’apport nutritionnel ?
  • Préciser l’étendue des impacts analysés, c’est-à-dire les frontières du système (« system boundaries »).
    Analyse-t-on le transport de l’objet ou uniquement sa fabrication ? Tient-on compte du risque que cet objet soit abandonné dans l’environnement (comme un sac en plastique) ? Tient-on compte de la pollution causée par la voiture des consommateurs qui vont faire leurs courses pour acheter le produit ?

Après ça, on peut collecter les données. On va par exemple regarder comment les bouteilles sont fabriquées et où, comment elles sont transportées, comment elles sont lavées, recyclées, si l’électricité est de source renouvelable ou fossile, etc.

Habituellement, on ajoute aussi une analyse de sensibilité à l’étude. C’est-à-dire qu’on fait varier certains paramètres afin de voir si leur variation peut changer les conclusions de l’écobilan. Imaginons qu’un écobilan montre qu’une bouteille réutilisable est meilleure pour l’environnement qu’une bouteille jetable. Si on change la température à laquelle on lave cette bouteille, reste-t-elle meilleure que la bouteille jetable ? Ou bien la température est-elle à même de faire changer la conclusion de l’écobilan ?

Enfin, une revue critique est parfois jointe à l’étude, ce qui permet d’avoir les avis d’autres acteurs. Professionnels, scientifiques, associations… peuvent critiquer les options retenues, les chiffres utilisés, l’unité fonctionnelle choisie, etc.

Quels sont les impacts analysés ?

La méthode officielle utilisée dans l’Union européenne (PEF) intègre 16 impacts à analyser[2] :

  1. le changement climatique ;
  2. les particules fines ;
  3. l’épuisement des ressources en eau ;
  4. l’épuisement des ressources énergétiques non renouvelables ;
  5. l’usage des terres ;
  6. l’épuisement des ressources minérales non renouvelables ;
  7. la destruction de la couche d’ozone ;
  8. l’acidification ;
  9. la radiation ionisante ;
  10. la formation photochimique d’ozone ;
  11. l’eutrophisation terrestre ;
  12. l’eutrophisation marine ;
  13. l’eutrophisation en eau douce ;
  14. la toxicité humaine cancérigène ;
  15. l’écotoxicité de l’eau douce ;
  16. la toxicité humaine non cancérigène.

On a donc une étude plutôt complète sur les impacts sur l’environnement d’un produit ! Malgré tous ces critères, les écobilans ont des limites (voir ci-dessous).
 

Qu’est-ce qu’un bilan carbone ?

Le bilan carbone fait le bilan des émissions de gaz à effet de serre[3] d’un produit, d’une personne ou d’un pays. Pour un pays, il comptabilise ainsi les émissions de gaz à effet de serre produits par toutes les activités du pays en question.

On utilise parfois une autre notion : l’empreinte carbone. Celle-ci tient compte de nos importations de produits (qui ont émis du carbone quelque part ailleurs dans le monde) et de nos exportations (et ces émissions-là seront comptées dans le pays importateur). C’est plus « juste » et ça permet de mieux refléter l’impact de la consommation d’un pays. C’est en effet un peu facile de diminuer ses émissions de gaz à effet de serre parce qu’on importe des produits de l’étranger plutôt que de les fabriquer ici.

Un écobilan intègre les émissions de gaz à effet de serre en plus d’autres impacts sur l’environnement.
 

Ces études sont-elles fiables ?

À moins de refaire soi-même un écobilan, difficile de critiquer sa fiabilité. Ce que l’on peut faire par contre c’est être attentif aux éléments et hypothèses retenus.

En effet, les conclusions d’un écobilan ou d’un bilan carbone seront liées à différents éléments :

  • Les aspects analysés. Typiquement un écobilan va s’intéresser aux phases qui ont a priori un impact réel. La fabrication d’un récipient par exemple, ou son nettoyage. Mais ne tiendra peut-être pas compte du transport du produit du lieu de fabrication au lieu de vente, car considéré comme anecdotique par rapport au reste.
  • Les hypothèses considérées. Va-t-on réutiliser le récipient deux fois, 10 fois, 20 fois ? Le lavera-t-on au lave-vaisselle, à la main ? Avec du savon et de l’eau chaude ? Et si oui, en quelles quantités ?
  • Comment on pondère les éléments. Un écobilan va par définition comparer des pommes et des poires, l’impact sur la pollution de l’air avec celui sur la pollution de l’eau. Cela implique aussi une forme de choix[4].
  • La qualité ou la disponibilité des données. Certaines données sont parfois manquantes ou dites peu « robustes » car peu fiables, trop variables ou fondées sur trop peu d’expériences. Typiquement, dans l’alimentaire, un écobilan n’analyse pas l’impact des pesticides sur la biodiversité, ni les effets cocktails de plusieurs pesticides, ni la dégradation des sols, etc. Pas parce que ces éléments ne sont pas importants, mais parce qu’il n’y a pas nécessairement de consensus scientifique sur comment les analyser. Parfois on manque de données ou de recul. C’est pourquoi cette méthode est actuellement décriée pour estimer l’impact des aliments[5]. Dans d’autres domaines, ça ne pose pas de problèmes : fabriquer un récipient en verre n’implique pas d’utiliser des pesticides par exemple.
  • La société ou l’organisme qui demande l’étude. Car elle peut avoir une influence sur ce qui est comparé, dans quel périmètre, etc.

Une façon de limiter ces variations est de faire une revue d’écobilans, à savoir rassembler dans un document les conclusions de différentes écobilans similaires afin de dégager une éventuelle tendance générale. C’est ce que Zero Waste Europe avait fait pour comparer les emballages réutilisables et les jetables[6].

Les écobilans ou les bilans carbone ont aussi des limites liées à leur nature même :

  • Un bilan carbone ne s’intéresse qu’aux émissions de gaz à effet de serre, pas à la pollution de l’eau ou à l’émission de microparticules dans l’air. Mais ils gardent évidemment leur intérêt au vu de l’importance des enjeux climatiques.
  • Un écobilan ne tient pas compte des aspects sociaux ou du coût d’un produit par exemple.

C’est important d’avoir ces éléments-là en tête quand on lit un écobilan.
 

Pourquoi est-ce utile de connaître l’étape-clé ?

Un écobilan va donner un résultat global valable selon les hypothèses retenues. Mais si on l’analyse en détail, on peut déterminer quelle est l’étape qui peut faire basculer le résultat. Est-ce la production, le transport, l’utilisation, le lavage… ? Si on veut réduire l’impact sur l’environnement d’un produit ou d’un service, ça permet de savoir où c’est le plus efficace d’agir.

C’est la production qui impacte le plus un bilan ? Alors on veille à utiliser le produit le plus longtemps possible. Est-ce que c’est la consommation d’électricité à l’utilisation ? Si oui, ça vaut peut-être la peine de remplacer l’appareil par un plus économe, même s’il fonctionne encore.

Cela permet aussi de voir qui peut améliorer les choses. Certains aspects dépendent des producteurs et il est alors intéressant d’essayer de faire évoluer les normes de production, de faire du lobby, etc. Dans d’autres cas, le consommateur peut vraiment agir pour améliorer le bilan du produit.

Plusieurs études concluent ainsi que les pailles réutilisables ont plus d‘impact que les jetables[7]. En effet, le nettoyage des pailles réutilisables peut « plomber » leur impact environnemental mais ça dépend comment on les nettoie. Tenir compte de l’impact des déchets de plastique dans l’environnement peut aussi changer les conclusions en faveur des pailles réutilisables, mais ce n’est pas pris suffisamment pris en compte[8].

Donc un écobilan peut présenter un produit comme moins bon selon ses hypothèses, mais ce n’est pas pour autant un mauvais produit. Dans le cas des pailles, si on lave la paille réutilisable à l’eau froide, celle-ci devient plus intéressante que la paille jetable[9].

Dans le même ordre d’idée, l’ADEME a montré que pour des produits électroniques (TV, ordinateur…), l’étape de la fabrication est plus importante que celle de l’utilisation. Autrement dit, c’est bien d’avoir un ordinateur qui consomme peu, mais c’est encore mieux de le garder longtemps pour éviter de devoir le remplacer.

Impact sur le changement climatique de différents appareils électroniques
Impact sur le changement climatique de différents appareils électroniques. En bleu, la phase de production. Elle est clairement majoritaire par rapport à la phase d’utilisation (en orange) pour pratiquement tous les appareils. Étude ADEME, 2018[10]. [Voir le graphique en plus grand]
 

Pour des objets qui consomment plus d’énergie à l’utilisation, comme un frigo, c’est presque l’inverse : l’utilisation a plus d’impacts que la fabrication. Ça peut alors valoir la peine de remplacer un vieil appareil par un récent si celui-ci est beaucoup plus économe.

Impact sur le changement climatique de différents appareils électriques avec peu d’électronique
Impact sur le changement climatique de différents appareils électriques avec peu d’électronique. En orange, la phase d’utilisation. Elle est clairement majoritaire par rapport à la phase de production (en bleu) pour pratiquement tous les appareils. Étude ADEME, 2018[11]. [Voir le graphique en plus grand]
 

Qu’est-ce que les écobilans n’analysent pas ?

En plus des limites déjà citées (périmètre de l’étude, unité fonctionnelle choisie, etc.), un écobilan n’analyse pas :

  • Les impacts autres qu’environnementaux. Les aspects sociaux par exemple ne sont pas analysés.
  • Le coût d’un système par rapport à un autre. Un produit meilleur pour l’environnement sera peut-être plus cher, ou moins cher. Mais ce n’est pas analysé.
  • L’impact sur l’environnement à un endroit précis, par exemple au niveau de l’usine qui produit des objets qui ont un bon écobilan. Le bon écobilan d’un objet par rapport à un autre ne veut pas que sa production n’a pas un impact significatif sur le lieu de production.
  • L’impact à l’échelle d’un pays, surtout si le produit qui a le meilleur écobilan n’est pas le meilleur sur tous les points. Par exemple, les emballages réutilisables sont meilleurs pour l’environnement mais demandent généralement plus d’eau à l’utilisation, ce qui peut potentiellement être un problème si les ressources en eau d’un pays sont particulièrement tendues[12].
  • Le côté pratique (ou non) d’un produit. Qu’il soit facile à utiliser ou pas n’intervient pas, l’écobilan s’intéresse uniquement à l’environnement.
  • Certains impacts. Malgré le nombre déjà important de critères retenus, les écobilans tiennent encore peu ou pas compte de la pollution par les microplastiques (d’un objet en plastique) ou l’impact des pesticides sur la santé (pour les aliments).

Une étude peut toutefois associer un écobilan à une analyse plus complète, incluant d’autres facteurs. C’était le cas pour l’étude du WWF-France sur les emballages réutilisables qui alliait à la fois des conclusions d’écobilans appliquées à l’ensemble du pays, mais également des considérations socio-économiques[13].
 

Analyse de quelques écobilans

Les conclusions d’un écobilan sont parfois contre-intuitives.

Feuille d’alu vs. boîte à tartines

C’est ainsi que certains écobilans ont déjà montré que la feuille d’aluminium pour emballer des tartines avait un peu moins d’impact sur l’environnement qu’une boîte à tartines, contrairement à ce que l’on dit habituellement[14].

Ècobilan comparant la boîte à tartines à un emballage en aluminium
Extrait de l’étude « LCA study of two different sandwich packs: A rigid plastic lunchbox and household aluminium foil » pour deux aspects environnementaux. La boîte à tartines à plus d’impact pour ces deux aspects (et les autres, non représentés ici) que le papier en alu.

Comment est-ce possible ? L’étude avait pris comme hypothèse que la boîte à tartines était lavée au lave-vaisselle après chaque usage.

Le remplissage du lave-vaisselle pour évaluer l'impact environnemental du lavage des boites à tartines
Pour évaluer l’impact du nettoyage d’une boîte à tartine dans un lave-vaisselle, on remplit le lave-vaisselle de boîtes à tartines et on divise l’impact du cycle de nettoyage par le nombre de boîtes à tartines[15]. On voit tout de suite que ça correspond peu au remplissage habituel que l'on peut faire de son lave-vaisselle et que cela influence forcément la consommation d'eau...

Au final cette phase de nettoyage était la plus importante de toute la vie de la boîte à tartines. Pour la feuille d’alu, c’était la fabrication. Mais laver la boîte à tartines au lave-vaisselle après chaque usage est-elle une bonne hypothèse ? C’est sans doute un peu exagéré, mais c’était l’option choisie par les auteurs de l’écobilan. Ça ne remet pas en cause la qualité les calculs de l’étude et c’est même éclairant sur ce qui est important : dans ce cas-ci, la phase de nettoyage de la boîte à tartines. Mais il ne faut pas rester sur l’éventuelle conclusion qui dirait que le papier d’alu est meilleur que la boîte à tartines[16].

Gourde vs. bouteille jetable

Un autre écobilan avait montré que pour boire 1,5 litre d’eau par jour la gourde en alu (remplie d’eau du robinet) avait plus d’impact que de consommer l’eau de 3 petites bouteilles de 500ml (sur deux ans et demi de temps).

Par quel miracle une gourde peut-elle avoir plus d’impact que des milliers de bouteilles en plastique, même recyclées[17] ? Là aussi c’est la phase de nettoyage qui avait un impact gigantesque.

En témoigne cet extrait de l’étude, qui compare quatre impacts environnementaux de deux types de bouteilles jetables et une gourde.

 

Comparaison d’impacts environnementaux entre des bouteilles en plastique jetables et une gourde en alu
Comparaison d’impacts environnementaux entre des bouteilles en plastique jetables et une gourde en alu (extrait). Source : Plastic (PET) vs bioplastic (PLA) or refillable aluminium bottles – What is the most sustainable choice for drinking water? A life-cycle (LCA) analysis. Tamburini et al. (2021) [Voir le graphique en plus grand]
 

Quand on regarde les effets sur le réchauffement climatique (GWP) on voit clairement que l’impact de la gourde (flèche verte, la 2e en partant de la gauche) est nettement inférieur à la bouteille jetable en PET (flèche bleue, à l’extrême gauche). Par contre la gourde est le pire choix si on la lave (flèche rouge, tout en haut du graphique).

Pourquoi ? Parce que les auteurs ont considéré qu’il fallait 3 litres d’eau chaude par jour pour laver la gourde. Pour une gourde qui n’a contenu que de l’eau, c’est une hypothèse particulièrement prudente, pour ne pas dire farfelue. Laver à l’eau courante est d’ailleurs reconnu comme peu efficace par l’étude. Laver la gourde avec un peu d’eau que l’on secoue ou un goupillon aurait été une hypothèse plus raisonnable, malheureusement non envisagée ici.

Tote bag vs. sac jetable

Un autre exemple éclairant est celui du tote bag. Suite à une étude faite en 2018, plusieurs articles de presse ont décrit le tote bag en coton comme une « catastrophe écologique »[18]. En cause ? Le nombre de réutilisations nécessaires pour qu’il soit meilleur qu’un sac en plastique jetable : entre 7000 et 20000 fois. Soit entre 20 et 54 ans d’utilisation quotidienne, c’est-à-dire bien au-delà de la durée de vie d’un tote bag.

Nombre de réutilisations de différents sacs de courses pour devenir meilleur que le sac en plastique jetable
Nombre de réutilisations de différents sacs de courses pour devenir meilleur que le sac en plastique jetable (LDPEavg) avec la fin de vie EOL3 (sac jetable réutilisé une fois comme sac poubelle). On voit que le sac en coton bio (COTorg) doit être réutilisé 20000 fois si on tient compte de toutes les catégories d’impacts sur l’environnement analysées[19].

Quand on y regarde de plus près[20], on se rend compte que ce qui détermine ce nombre très élevé de réutilisations est un impact bien spécifique sur l’environnement : l’effet sur la couche d’ozone. En effet, pour déterminer le meilleur choix, l’étude a pris les plus mauvais scores dans chaque impact environnemental[21]. Et pour le coton, c’est l’effet sur la couche d’ozone.

Et pourquoi le coton a cet effet sur la couche d’ozone ? Car la production d’électricité retenue par l’étude - au moyen de gaz naturel - a un impact sur la couche d’ozone. Produire de l’électricité autrement pourrait éviter cet impact, mais cela n’a pas été étudié par l’écobilan en question.

Si on se limite à l’impact sur le changement climatique, le nombre de réutilisations tombe entre 52 et 149. Et encore, on pourrait presque diviser ces nombres par deux car le sac en plastique jetable pris en référence dans l’étude a un volume de 22 litres et celui en coton bio, de 20 litres. L’étude a donc tenu compte de l’impact de deux sacs en coton bio si on veut pouvoir au moins transporter ce qu’un seul sac en plastique peut transporter (et même si au final les deux sacs en coton peuvent transporter 40 litres). Ce qui augmente forcément tous les impacts pour le coton bio.

Tous ces éléments sont présents dans l’écobilan, mais ne se retrouvent pas dans le résumé des recommandations. Les conclusions restent cependant valables : ce qui est important dans le cas d’un sac réutilisable c’est bel et bien de le réutiliser. Accumuler des sacs en coton n’est pas un bon choix pour l’environnement…[22]

> Lire aussi : Le tote bag en coton est-il écologique ?

Tomates locales de saison vs. les autres tomates

Un écobilan suisse montre que les tomates locales de saison ont beaucoup moins d’impacts sur l’environnement que toutes les autres (c’est-à-dire les tomates importées ou les tomates locales qui poussent sous serres chauffées).

Écobilans des tomates : comparaison de différents modes de culture
Extrait de « Écofacteurs suisses 2021 selon la méthode de la saturation écologique », OFEV. [Voir le graphique en plus grand]
 

Mais la source d’énergie a son importance. Les tomates locales sous serres chauffées grâce aux rejets thermiques d’incinérateurs de déchets (UIOM dans le graphique) ont un meilleur bilan que celles venant de serres chauffées au gaz naturel. Si c’est certainement une meilleure idée de chauffer des serres avec des rejets de chaleur industriels plutôt que d’utiliser du gaz naturel, on pourrait aussi se dire que cette énergie venant des incinérateurs pourrait être utilisée à meilleur escient que pour cultiver des tomates hors saison[23].

Impact climatique de divers aliments

Pour certains produits, le choix du critère de comparaison (l’unité fonctionnelle) peut faire varier fortement les résultats.

C’est le cas de l’alimentation. Quand on compare du lait, de la viande, des légumineuses, des fruits… on compare habituellement par kilo de matière (un kilo de bœuf, un kilo de volaille, un kilo de lentilles…). Or, si on compare selon l’apport en protéines, on a des résultats différents. Peut-être pas de nature à changer l’ordre, mais bien l’importance de la différence.

Comparaison de l'impact sur le climat de plusieurs aliments
Comparaison d’aliments : impact concernant le changement climatique (« CC », en axe vertical) selon que l’on compare en poids, en apport caloriques ou en protéines. Les quantités sont choisies selon un menu-type. Par ex. la quantité de légumes secs analysée apporte la même quantité de protéines que le menu type « INCA2 »[24]. L’impact environnemental est représenté par la hauteur de la barre. Source : ADEME[25]. [Voir le graphique en plus grand]
 

Par exemple pour le bœuf : on voit que l’impact en matière de changement climatique (CC) est beaucoup plus élevé que celui des légumes secs si on compare en fonction du poids (on compare une même quantité, par ex. un kilo). Si on compare selon les apports en protéines l’ordre reste le même : le bœuf a toujours plus d’impacts que les légumes secs pour un même apport en protéines. Mais la différence est moins grande. C’est cependant très compliqué de comparer les aliments selon leurs apports nutritionnels.
 

Un outil extraordinaire, mais qui n’est pas absolu

Les écobilans ont plein de défauts. Mais ça reste un outil indispensable pour objectiver et guider des choix en faveur de l’environnement. C’est aussi un outil en constante évolution et des aspects qui sont peut-être un peu négligés actuellement seront mieux pris en compte à l’avenir.

Il faut aussi se résoudre à ne pas trouver le produit idéal. C’est aussi ça que montre un écobilan : il faut parfois faire des choix et privilégier un aspect par rapport à un autre.

Un sac en coton bio doit être réutilisé 150 fois ? Certes un sac en plastique réutilisable est un meilleur choix du point de vue de l’écobilan. Mais si on prend un sac en coton équitable, on sait qu’il a été produit dans de bonnes conditions et qu’il n’émettra par définition par de microplastiques dans l’environnement.
 

Plus d'info

 

[1] Un article intéressant sur ce qu’est un écobilan et d’où cela vient : « L’Analyse du Cycle de Vie, nouvel outil d’évaluation environnementale à l’appui des politiques publiques locales : Quelle appropriation par les services d’assainissement ? » sur cairn.info

[2] D’autres méthodes existent, à voir en p50 du document Ecofacteurs suisses 2021 selon la méthode de la saturation écologique, OFEV 2021

[3] On parle de carbone par analogie avec le CO2, le dioxyde de carbone, mais on compte tous les gaz à effet de serre et pas uniquement le CO2.

[4] On n’est pas obligé de pondérer les différents impacts pour avoir une cote globale. Mais il est alors plus difficile de savoir quel est le meilleur produit. Sauf si un produit à lui seul à le moins d’impact sur tous les critères, mais ce n’est pas toujours le cas. Des méthodes de pondération existent. Une d’entre-elle évalue l’importance d’un impact selon son éloignement à ce qui est autorisé par la législation (par ex. sur la quantité de polluant autorisée par litre d’eau). C’est la méthode choisie en Suisse (UBP).

[5] L’UE a décidé de ne pas retenir la méthode PEF pour vérifier les allégations environnementales. Voir sur inrae.fr un des (nombreux) articles sur les défauts des ACV (analyses de cycle de vie) pour tenir compte de certains impacts typiques de produits alimentaires, particulièrement bio.

[7] Par ex. l’étude « Links between production, the environment and environmental policy ». Cambridge Econometrics, 2019, à la demande de la Commission européenne dans le cadre de la directive SUP. Cette étude de 2020 a également la même conclusion. C’est le nettoyage des pailles réutilisables qui a le plus d’impact, mais tenir compte d’une mauvaise gestion des pailles (par ex. jetées dans la nature) pourrait changer les résultats.

[8] L’étude précitée le met d’ailleurs en avant.

[9] Dans cette thèse « Plasticless: a comparative life-cycle, socio-economic, and policy analysis of alternatives to plastic straws » l’usage d’eau chaude fait exploser le bilan environnemental de la paille réutilisable. Lavée à l’eau froide (et au goupillon), la paille réutilisable redevient le meilleur choix.

[10] ADEME. J. Lhotellier, E. Less, E. Bossanne, S. Pesnel. 2018. Modélisation et évaluation ACV de

produits de consommation et biens d’équipement – Rapport. 186 pages.

[11] Attention que les résultats sont favorablement influencés par la forte nucléarisation du parc français, peu émetteur de CO2. ADEME. J. Lhotellier, E. Less, E. Bossanne, S. Pesnel. 2018. Modélisation et évaluation ACV de

produits de consommation et biens d’équipement – Rapport. 186 pages.

[14] LCA study of two different sandwich packs: A rigid plastic lunchbox and household aluminium foil. Institut für Energie- und Umweltforschung Heidelberg GmbH (2013).

[15] Image extraite de « LCA study of two different sandwich packs: A rigid plastic lunchbox and household aluminium foil. Institut für Energie- und Umweltforschung Heidelberg GmbH (2013). ». En vrai on cherche surtout un petit trou dans le remplissage du lave-vaisselle si on veut vraiment la laver au lave-vaisselle, mais dans un écobilan on est bien obligé d’avoir une valeur objective, valeur que l’on peut avoir en le remplissant et en divisant l’impact total par le nombre de boîtes à tartines lavées.

[16] D’autant que l’étude n’avait pas analysé l’impact de l’emballage par la marmotte.

[17] 3 bouteilles par jour sur 2,5 ans soit 930 jours, au total : 2790 bouteilles.

[18] Par exemple dans Madame Figaro.

[20] L’article de Parkpoom Kometsopha, « Breaking down the Danish study on the environmental impacts of grocery carrier bags » est particulièrement complet et étayé. On en reprend ici les points principaux, que l’on a vérifiés dans l’étude initiale.

[21] Ce qui est logique si on veut déterminer le meilleur choix toutes catégories confondues.

[22] Même si on est d’accord qu’il y a des gestes qui ont plus de bénéfices sur l’environnement que de bien réutiliser ses sacs en coton.

[23] Et qu’il vaut mieux moins de déchets que d’avoir des déchets à incinérer, même si on en récupère de la chaleur.

[24] C’est le nom de l’enquête alimentaire française, qui détermine ce qui est mangé en moyenne par personne en France.

[25] L’Affichage Environnemental des Produits Alimentaires, Rapport du Conseil Scientifique ADEME/INRAe, 2021.

[26] Surtout pour la partie FAQ. La méthode suisse (UBP) est différente de celle habituellement utilisée dans l’UE (PEF) mais les principes restent les mêmes.

 

Voir aussi

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